mercredi 26 décembre 2012

2012


L'année se termine, c'est l'époque des bilans, je n'aime pas ça et en même temps, ça a un petit air d’Éternel Retour... A quoi m'aura servi cette année 2012 ? Et quelle est donc cette poussée utilitariste, d'un coup d'un seul ? Je formule autrement : avec quoi distinguer cette année des précédentes et futures ? Comme par un fait exprès, ce journal témoigne, mais un petit peu, des hauts des bas et surtout des pas de côté. 

Janvier - J'ai débuté l'année par La dialectique peut-elle casser des briques ?, ce joyaux situationniste associé à une interrogation en sourdine sur l'euphémisation de la violence dans nos sociétés. Et puis, j'ai cherché, en vain, les quelques fulgurances qui pourraient égayer ce journal. Et c'est bien vrai : pas grand chose à se mettre sous la dent. Cette année... il y a bien eu le néologisme experblabla... Tant mieux, quelque part... ça prouve bien qu'on ne peut pas "être poète à ses heures"...

Février - La grande entourloupe Free ! écrire simplement le nom de cette entreprise m'écorche les doigts. Free... et pourquoi pas Apple tant qu'on y est ? Vade retro Satanas ! Ça palpite et ça swingue assez peu cet hiver. Guéant fait une sortie sans cache-nez et s'enrhume, moui... Hollande ! annonce la couleur, ça sent le >> centre-gauche << à plein-nez. Les mélenchoniens m'énervent déjà... 

Mars - R.A.S. Pff !... Caroline-line-line... Quelle tristesse de devoir en parler. Mélenchon, un effort ? Quelle (fausse) naïveté...

Avril - R.A.S. puissance 2 ! Fausse naïveté bis. Démocratie = Tirage au sort. Autant prêcher dans le désert.

Mai - Un peu de beau moqueur sur la fin de Sarkozy : Exit ! Mais d'une opposition l'autre... immédiatement en rogne contre le >> centre-gauche <<. 2012 aura quand même été l'année de la découverte de l'historien Henri Guillemin - magnifique clé de compréhension des 2 siècles de "gouvernement représentatif" sous domination du >> centre-gauche << comme meilleur instrument de conservation des intérêts. La Grande Entourloupe. En revanche, les bouquetins de Sous-Dîne me remettent sur un meilleur pied.

Juin - Ces zozos journalistes, encore... et ceux, plénipotentiaires et inégalés dans l'histoire du monde et à travers les galaxies, de la Commission Européenne, "féministes". SOS Baleines veut sauver les baleines, SOS Racisme veut sauver le racisme, le féminisme par la Commission Européenne, c'est du même tonneau. Mémorable vidéo !

Juillet - Alerte ! des journalistes se surpassent. Adieu Charlie. Pérégrinations montagneuses : Ah !

Août - Là-haut, dans la Montagne. Au sommet du Mont Qâf ! Je me sens de plus en plus intégriste. Léon Bloy et Thelonious Monk m'y aident. Balthazar, aussi... l'âne. Tiens, j'aime bien, c'est vrai, la phrase : d'un âne à une âme, il n'y a qu'un pont. Au retour des vacances, grand sujet d'énervement : l'Affaire Millet.

Septembre - Défendre Millet contre les médiacrates devient une obsession. Point de non-retour atteint avec ces chiens de garde que je ne tolère absolument plus. Quelques promenades narrées, encore... 

Octobre - Par la barbe du Prophète, je m'en prends encore aux journalistes premiers pourfendeurs de la liberté d'expression bien qu'ils s'en proclament premiers défenseurs. Je veux bien prendre l'engagement de ne plus en parler, mais je suis convaincu qu'ils parviendront à se surpasser encore et toujours, et que ça va m'énerver. Une sonate d'automne, sinon, qui restera dans ma mémoire... Ainsi qu'une belle pensée en forme de violette jaune... 

Novembre - Encore et encore du médiacrate. Le permis littéraire en lecture accompagnée pour le populo. Je retiens aussi. Un article étymologique sur le nénuphar qui m'a valu un commentaire délirant, en anglais, mais dithyrambique comme ce n'est pas permis... à lire ce commentaire, j'étais un grand écrivain comme Louis-Ferdinand Céline... Heureusement, l'auteur a eu la sagesse de supprimer ce commentaire. Pour changer, je m'énerve contre le Front de Gauche... Bah oui, je devrais en être assez proche, mais ils font tout rien que pour m'énerver. 

Décembre - Une note shadokienne, un petit accent, une petite touche ajoutée... quelques photos pour rendre hommage à Rûmî... Léon Bloy en avocat de Dieudonné. Et, donc, experblabla !...


Je m'accorde donc 3 points pour cette année de gribouillages, la plus prolifique de l'histoire de ce journal en ligne, pourtant... Ce n'est pas beaucoup. Il faudra s'en contenter avant de pouvoir se consacrer, plus pleinement, à ces activités diaboliques.

Ah ! oui... j'oubliais, les films, les livres, les disques de l'année. Rien, aucun. Aucun ! Que dalle... Rien vu, rien entendu. Si, Millet... par accident. Je suis tout entier hors du temps. Il fallait le faire... Mais je ne l'ai pas fait : j'ai vu le James Bond. Un James Bond réactionnaire, au bon sens du mot - au bon sens je veux dire au sens qu'il me plaît de l'être, réactionnaire. Je n'en ai pas parlé, pourtant. Je ne sais pas si cet oubli sera réparé. 



2012+1=2013

Sic transit gloria mundi, amen.

mardi 18 décembre 2012

Le nouvel excommunié

 Il y eut cette grand-messe-ci : 


Il en manquait un, un seul - le seul - celui qui s'en prend au communautarisme, et à toutes les communautés. Les communautés : toutes sortes de gens qui se regroupent entre eux parce qu'ils sont noirs, les uns, parce qu'ils sont juifs, les autres, parce qu'ils ont des chapeaux ronds, peut-être... pour défendre les intérêts de ces gens-là. C'est une logique que je trouve quelque peu raciste. Il serait beaucoup trop peu raisonnable de défendre les intérêts des autres, voire, horresco referens !... les intérêts de tous. En revanche, en tant que représentant de la communauté de Truc, il est tout à fait logique de défendre la communauté de Machin - c'est le communautarisme qu'il faut défendre, un peu comme le marin a besoin de la mer pour naviguer. 

Quand, hébété et ahuri, on ne se sent d'aucune communauté, et qu'on ne reconnait aucune médiation entre l'individu et la communauté humaine (à moins de tomber sur un extrémiste d'extrême qui considérerait lui non pas l'humanité mais la Nature, mais c'est encore autre chose), on attaque de fait les communautés. Mais le clamer ouvertement, c'est pousser le bouchon un peu loin : elles vous tombent toutes dessus. 

Et c'est ainsi qu'Allah est grand et qu'en 2012, la société pleure d'admiration devant cette ribambelle de comiques sponsorisés, mais négationne le seul Artiste. Pour rire, vraiment rire, contre le racisme, vraiment contre le racisme : 




Et voici l'introduction du petit livre de Léon Bloy (Un brelan d'excommuniés), que je suis bien obligé de proposer à la transposition à notre temps :

Nous assistons en France, et depuis longtemps déjà, à un spectacle si extraordinaire que les malheureux appelés à continuer notre race imbécile n'y croiront pas. Cependant, nous y sommes assez habitués, nous autres, pour avoir perdu la faculté d'en être surpris.

C'est le spectacle d'une Église, naguère surélevée au pinacle des constellations et cathédrant sur le front des séraphins, tellement tombée, aplatie, caduque, si prodigieusement déchue, si invraisemblablement aliénée et abandonnée qu'elle n'est plus capable de distinguer ceux qui la vénèrent de ceux qui la contaminent. 

Que dis-je ? Elle en est au point de préférer et d'avantager de ses bénédictions les plus rares ceux de ses fils qu'elle devrait cacher dans d'opaques ombres, clans d'occultes et compliqués souterrains, dont la clef serait jetée, au son des harpes et des barbitons, dans l'abîme le plus profond du Pacifique, par des cardinaux austères expédiés à très grands frais sur une flotte de trois cents vaisseaux !

Quant à ceux-là qui sont sa couronne, ses joyaux, ses éblouissantes gemmes et dont elle devrait adorner sa tête chenue autrefois crénelée d'étoiles, elle décrotte ses pieds sur leur figure et délègue des animaux immondes pour les outrager.

Je l'ai dit autre part, avec force développements. Les catholiques modernes haïssent l'Art d'une haine sauvage, atroce, inexplicable. Sans doute, il n'est pas beaucoup aimé, ce pauvre art, dans la société contemporaine et je m'extermine à le répéter. Mais les exceptions heureuses, devraient, semble-t-il, se rencontrer dans ce lignage de la grande Couveuse des intelligences à qui le monde est redevable de ses plus éclatants chefs-d’œuvre.

Or, c'est exactement le contraire. Partout ailleurs, c'est le simple mépris du Beau, chez les catholiques seuls, c'est l'exécration. On dirait que ces âmes médiocres, en abandonnant les héroïsmes anciens pour les vertus raisonnables et tempérées que d’accommodants pasteurs leur certifient suffisantes, ont remplacé, du même coup, la détestation surannée du mal par l'unique horreur de ce miroir de leur misère que tout postulateur d'idéal leur présente implacablement.

Il s'effarouchent du Beau comme d'une tentation de péché, comme du Péché même, et l'audace du génie les épouvante à l'égal d'une gesticulation de Lucifer. Ils font consister leur dévote sagesse à exorciser le sublime.

On parle de critique, mais le flair de leur aversion pour l'Art est la plus sûre de toutes les diagnoses ! S'il pouvait exister quelque incertitude sur un chef-d’œuvre, il suffirait de le leur montrer pour qu'ils le glorifiassent aussitôt de leurs malédictions infaillibles. 

En revanche, de quelles amoureuses caresses cette société soi-disant chrétienne ne mange-t-elle pas les cuistres ou les imbéciles que sa discernante médiocrité lui fait épouser ! Elle les prend sur ses genoux, ces Benjamins de son cœur, elle les dorlote, les mignotte, les cajole, les becquette, les bichonne, les chouchoute, les chérit comme ses petits boyaux ! Elle en est assotée, coqueluchée, embéguinée de la tête aux pieds ! C'est une osculation et une lècherie sans fin ni rassasiement !

L'experblabla, en attendant le tohu-bohu

Je cherche l'Abrutisseur. C'est idiot - il n'y en a plus besoin. Il n'y a plus rien. Au temps jadis, comme elle disait, le Chevalier à la Triste Figure attaquait les Géants, Zarathoustra philosophait bien à coups de marteau contre le christianisme, et Bardamu encore, s'en prenait à Vinico et Cinéma.

Aujourd'hui, il n'y a plus rien à abrutir... personne ! pas âme qui vive... Aujourd'hui, le langage Robot règne, professé par l'Expert. Le technocrate, personne ne le comprend, personne ne le conteste. Aujourd'hui, il faut voir ce Ministre, il connait son histoire, il ne se mettra pas le doigt dans l’œil... et pour cause ! il est vide son œil. Tout ce qu'il a à dire est prouvé par a + b, tout est computé, ça sort directement de la Grande Logique. C'est dans les Manuels - d'ailleurs il n'y a plus de manuels, mais des écrans, du tactile... touché coulé. 
L'Europe c'est un Projet de Paix. Horresco referens !... Un petite citation de Victor Hugo peut-être ? Si ! si... elle est enregistrée sur le disque dur, la Mémoire la retrouvera vite. J'étais petit, vous aussi sans doute, à moins que, à l'image des pigeons qui sont tous grands (je vous mets au défi de trouver dans les rues un bébé pigeon), vous soyez nés grands ; j'étais petit, je me souviens, et je le croyais ce Grand Baratin.

"Dans une volonté d'union, dans un projet de partenariat... Nous partageons avec les USA un certain nombre de valeurs." Absolu véridique raisonnable experblabla certifié qu'on forme avec les têtes kaputt petites et grandes. Hey Bernie, les documents de la CIA ont été déclassifiés. Les contes et légendes, ils étaient plus jolis au temps des Mille et Une Nuits. Achtung ! konzpirazionist !

"Ça progresse. Il ne peut pas y avoir d'Europe fonctionnant comme un Marché Intérieur Efficace s'il n'y a pas d'harmonisation sociale et fiscale." Eh ! bien la MIE va se croûter, comme par un fait exprès... par un fait exprès ! c'est la raison d'être économique du schmilblick : à une époque où il fallait ouvrir les frontières pour raisons industrieuses, les gros avaient prévu de manger les petits (à qui on donnerait l'agriculture en compensation). Mais si les petits se mettent à devenir des gros : où allons-nous ? qui mangera qui ? ça n'a pas de sens, voyez-vous. Plus ça progresse, plus le Progrès n'apparait pas, ce qui n'a aucune importance, seul compte que ça progresse. "Tout ce qui est bon doit apparaître, tout ce qui apparait est bon". Le Progrès fait rage. Achtung ! reaktionär !
Finalement, ce grand experblabla est si insignifiant, obscur, abscons... personne ne s'en occupe. Audimat : Plus belle la vie dépasse le JT de 20h ! Pujadas à la corbeille ! Le Peuple est indifférent à un tel Langage... il cherche l'information sur Internet, en se passant de ces marchands de sable, pour ne pas dire du Temple. Il n'y a plus, finalement, qu'à retourner caméras et télévisions, et nous regarderions vivre ces Journalistes, ces Politiciens, ces Économistes, ces Spécialistes, dans leur bocal, leur aquarium, leur réserve. Des espèces disparaissent tous les jours, mais eux, les Médiacrates, ils auront la chance de survivre. 5 euros l'entrée au Musée de la Médiacratie. Grande promotion de lancement : 15 euros au lieu de 50 l'écharpe rouge de Barbier ; 25 euros en lot avec la chemise blanche déboutonnée, portée par Bernard-Henri (DVD de l'intégrale des JT de David Pujadas, laisse d'or du Siècle, en cadeau) ; et, pour les plus motivés et/ou les plus nostalgiques, l'émission-débat 24h chrono entre Alain Minc et Marc Touati, au prix modique de 75 euros (la moitié des gains reversés à Goldman Sachs). Achtung ! populiszt !

Tant qu'il reste des pains au chocolat à se faire voler, ce brouhaha nous bercera. Bonne nuit, les petits. En attendant le tohu-bohu ! le ramdam ! Achtung ! terrorist ! anarchist !

samedi 8 décembre 2012

Vive Mademoiselle France !

les oiseaux sont des cons
Me voici chargé de tester ma patience devant un spectacle, que dis-je ? devant le spectacle, que dis-je ? devant le Spectacle par excellence : l'élection de Miss France sur TF1. Chacun de ces mots est un clou pour me crucifier. Ah... l'émission va commencer, et je me sens déjà dans l'état d'esprit d'un Ignatius prêt à cracher du feu. Seul le souvenir de Pierre Desproges, "juge de touche" lors de cette compétition, me radoucit légèrement. 

"Miss France" : déjà, ce n'est même pas français. Pourquoi diable cela ne s'appelle-t-il pas "Mademoiselle France" ? Oh !... je vous entends déjà : ce serait ridicule, et d'une ; le nationalisme c'est la guerre, et de deux ; on a supprimé le terme mademoiselle, et de trois. Eh ! bien moi, je maintiens mon "Mademoiselle France". C'est ridicule, c'est vrai... alors c'est parfaitement cohérent avec le contenu de l'émission comme titre. 

Élection, piège à cons ! Devant notre échec à promouvoir l'idée du tirage au sort auprès des honnêtes gens, pourquoi ne pas essayer de le faire auprès des demoiselles de France ? Il y a toutes les chances pour que le sort désigne comme Mademoiselle France quelqu'un de tout à fait normal... je veux dire... une demoiselle qui ne serait pas pour la Paix dans le monde et qui n'aurait jamais fait de photos dénudée dans je-ne-sais quel magazine déglingué. Preuve serait ainsi faite de la supériorité du tirage au sort sur l'élection. Même Madame Chapeau - comment s'appelle-t-elle ? avec un nom de pomme-de-terre je crois... oui ! Madame de Fontenay, elle-même, approuvera. 

Ça commence. "Les mésanges bleues du ravissement s'envolèrent et je fus aussitôt replongé dans l'ignoble réalité, dans la très puante et la très maudissable réalité." (Léon Bloy) Je suis déjà malade, complètement malade. Oh mon Dieu ! quelle remarquable insulte au bon goût ! Puis-je en croire mes yeux ? Suis-je vraiment le témoin d'une perversion aussi totale ? Je ne puis le croire, mesdames et messieurs les jurés.

Quel est le con qui a dessiné la scène ? Comment peut-on accumuler autant d'épouvantails en si peu d'espace et de temps ? Qui est l'auteur de cet exploit insensé d'avoir réuni ce qui se fait de pire dans tous les champs de l’œuvre humaine ? Cette musique... ces couleurs... ces jeux de lumière... ces robes blanches... ces petits pas de danse, d'un ridicule ahurissant... que fout Alain Delon ici ? pour un numéro si pathétique et lamentable avec "Mimi".

C'est insensé ! qui a réalisé ces petits clips de présentation des candidates ? C'est insupportable ! je zappe. Et là... France 2. Le Téléthon... que vois-je ? qu'ois-je ? Trois grotesques zigotos : Garou, Dubosc et Patrick Bruel, qui appellent manifestement ça chanter, qui appellent manifestement ça une bonne action. 

21h15 : je suis vaincu. Mes nerfs ne pouvaient tolérer que 15 minutes d'un tel Spectacle. Et si je lisais quelques pages du journal de Léon Bloy, ce ne serait pas plus réjouissant par hasard ? Ou du Céline, tiens :
De semblables et monstrueuses inconsistances sont bien faites pour dégoûter à tout jamais le plus patient, le plus tenace des sociophiles. 

Le plus patient et le plus tenace des sociophiles, ce que je suis bien loin d'être, déjà... Après 15 minutes, j'envisageais d'ores et déjà le rétablissement de la peine de mort. Devenu plus raisonnable après quelques saillies littéraires, je pense plutôt à monter Rossinante et partir combattre les Géants à travers la campagne...

jeudi 6 décembre 2012

Le feu, c'est joli mais ça brûle

Il ne faut surtout pas trop s'approcher des nouveaux faisceaux, des nouveaux rayons, des nouveaux soleils. Tout est ici. Regardez ces milices fascistes à l’œuvre : ça fait froid dans le dos, n'est-ce-pas ?




"Que s'anéantisse celui à qui manque cette flamme !"














Et c'est ainsi qu'Allah est grand.

lundi 26 novembre 2012

Cherche Front de gauche désespérement

Soyons naïfs - c'est ce qui nous est demandé - Mélenchon parle de "Front de gauche", et supposons donc qu'il est vraiment de gauche.

Par les temps qui courent, le peuple de gauche pourrait se réjouir. La déconfiture de l'UMP dépasse toutes les espérances. Même Simone Weil, "pas la grosse dame qui préside..." non la philosophe de gauche, dans l'arsenal qu'elle a mis sur pied pour tailler en pièces la notion de parti politique, n'aurait pu prévoir une telle Bérézina - de quoi se fendre la poire, et les poires doyennes sont vraiment excellentes en cette saison. 

Hélas ! mille et une fois hélas ! à peine avons-nous fini de railler la droite que nous sommes bien contraints de contempler le gouffre qui nous empêcher de rallier la gauche. 

Je veux dire : la gauche. Je ne parle pas du PS... autant passer son temps à démontrer qu'un chat est une souris. Non, le Front de gauche, présenté comme la gauche de la gauche, ou l'extrême-gauche... même retraduit, ça donne : la gauche de l'extrême-droite, ce qui laisse une infime chance de se retrouver quelque part à gauche. D'ailleurs, souvenez-vous : le bruit et la fureur, AAA les andouillettes chez Moody's, le capitaine de pédalo, Chavez, que se vayan todos (le Siècle et le Fouquets)... 

Pourquoi le Front de gauche ? Parce que Mélenchon a voté Maastricht, et a ensuite compris son erreur. Il a entrepris de rétro-pédaler au sein du PS puis en dehors, en analysant à la fois le mauvais chemin de la construction européenne, et la forfaiture démocratique qui l'impose contre la volonté des peuples. 

Il se trouve que nous pensons qu'il faut encore tirer le fil pour remonter plus loin, que ces hautes-trahisons oligarchiques sont contenues dans nos anti-constitutions antidémocratiques. Depuis le travail d'Etienne Chouard, nous essayons de remettre les mots à l'endroit, puisque tout le monde avant 1789 opposait strictement la démocratie (quasiment assimilée par tous les penseurs politiques à l'anarchie et à la menace de la populace) au gouvernement représentatif. L'une était le contraire de l'autre. Le tour de passe-passe est formidable : les honnêtes gens ont fait le gouvernement représentatif et l'ont appelé de son contraire - la démocratie. Depuis, nous l'avons gobé. C'est pourquoi nous nous plaçons en faux : c'est au peuple d'écrire sa constitution. C'est dépasser Mélenchon par la gauche. 

On pourrait toutefois s'attendre à ce qu'une discussion soit possible. Même des personnalités de droite comme François Asselineau et Nicolas Dupont-Aignan acceptent la discussion sur les institutions et la rénovation démocratique, sans pour autant partager nos conclusions sur le tirage au sort par exemple. 

Mais le Front de gauche, lui, ne veut pas de discussion. Alors que Utopia et le Front de gauche avaient invité Etienne Chouard pour parler de ces questions, ils se sont finalement aperçu - mais de quoi au juste ? Vous savez bien... c'est la bête immonde... les heures les plus sombres de notre histoire... l'extrême-droite... le fasciiiisme... Etienne Chouard relaie des sites à la dangerosité très dangereuse, et sans même avertir en bandeau qu'il faut manger 5 fruits et légumes par jour, pour votre santé. Imaginez un peu la scène : vous êtes un honnête gauchiste un peu radical, vous vous interrogez après avoir entendu le sieur Mélenchon parler du club le Siècle, et vous vous renseignez sur les institutions et les trahisons démocratiques, vous tombez sur le site d'Etienne Chouard et jusque-là tout va presque bien, mais bientôt c'est le grand tourniquet, vous risquez d'atterrir chez... mais Alain Soral... mais Thierry Meyssan... mais Jacques Cheminade... oui c'est aussi horrible que cela ! et bientôt ce sera Dieudonné, mi-nègre mi-Hitler vous savez... 

Résumons-nous : parce que le Front de gauche ne nous juge pas assez adultes pour avoir du discernement sur ce que nous lisons, il s'offusque qu'Etienne Chouard invite à des lectures pluralistes, faisant lui le pari de la maturité de son public ; conséquence de quoi, le Front de gauche ne peut pas cautionner une discussion avec Etienne Chouard. 

C'est pure folie.

Cet anti-fascisme sans fascisme prend des proportions de plus en plus ridicules et grotesques. 

Et ça peut continuer demain si le bouffon est envoyé en prison. 

Jean Baudrillard est mort, qui expliquait que c'était un immense honneur fait à l'extrême-droite de considérer d'extrême-droite tout propos hétérodoxe. Voilà le résultat. La gauche n'existe plus. C'était peut-être la condition préalable au redressement.

mardi 13 novembre 2012

Un nénuphar sinon rien



J'apprends ce jour la dégringolade du mot nénuphar, défait de son ph pour se voir affublé d'un f pas à la hauteur. Ma réaction de réactionnaire est d'une part de ne pas comprendre ces tentatives réformatrices pour "simplifier", argument le plus insensé qui soit. Et nénufar... c'est moche. 

Mais au fait, pourquoi ce ph ? Parce qu'on écrivait nénufar jusqu'au XIXe siècle... d'après l'Académie Française, mais je vous rappelle que cette même Académie est celle coupable de cette phrase extraordinaire :
La bonne orthographe distingue les gens de Lettres d'avec les Ignorants et les simples femmes.

Si on en croit plutôt le Trésor Informatisé de la Langue Française, c'est à n'y rien comprendre. On écrivait nenuphar, neuenufar, neufar, ou encore nenufar, d'un mot emprunté au latin médiéval... nenuphar, lui-même dérivé de mots arabes issus du persan nilufar d'après le sanskrit nilotpala, ce qui est élémentaire puisque nilah signifie "bleu-noir" et utpalam "fleur de lotus". nilotpala veut donc dire "lotus bleu". On se demande à ce stade que vient faire Tintin dans l'histoire.

Résumons-nous : on est passé d'un f en persan, parce que sans faire de négationnisme anti-sanskrit, je vois mal l'influence de nilah-utpalam dans l'orthographe f/ph qui nous concerne, d'un f en persan, disais-je, à un ph en latin, puis un f en vieux françois, à un ph en français moderne, et désormais à un f en français "modernisé-simplifié-dégénéré".

D'autres en auraient perdu leur latin. Mais pourquoi les dix-neuviémistes ont-ils jugé opportun de rendre au mot son ph ? Mais par souci naturaliste, pardi ! Le nénuphar est une plante de la famille des nymphéacées : le tout a donné son ph a la partie.

Si vous vous croyez sortis d'affaire, vous allez déchanter. D'où vient nymphéacée ? Tenez-vous bien : "emprunté au latin nymphea "nénuphar"" qui lui vient du grec pour dire "divinité", "jeune fille ou jeune femme" ou d'autres diableries extravagantes.

Conclusion : un nénuphar, c'est joli. C'est pourquoi j'arbitre ce duel gréco-perse en faveur des premiers. Mahmoud me pardonnera.


samedi 10 novembre 2012

Danger ! Toxique ! Littérature.

Voyage au bout de la nuit est un livre très dangereux et très toxique. Frédérique Leichter-Flack veut bien qu'on le lise, mais avec un pharmacien sur son épaule. Le populo passera désormais son permis littéraire en lecture accompagnée.

On fera exception pour l'ado, qui est un abruti qui ne comprend rien - pas même la haine, et qui pourra donc lire le livre. La haine : il n'y a que ça dans le Voyage, chef-d’œuvre, d'accord, mais toxique.

Mme de Stael à propos de Robespierre : "ses traits étaient ignobles, ses veines étaient d'une couleur  verdâtre, il professait sur l'inégalité des rangs et des fortunes les idées les plus absurdes".

Frédérique s'offusque que Céline fustige les guerres même révolutionnaires. Michelet : le volcan révolutionnaire jetait ses étincelles sur le monde entier, l'océan révolutionnaire qui déborde, bla, bla, et reblabla. En effet, nous n'admettons pas ces guerres girondines menées pour razzia ainsi que pour tranquillité intérieure - cf. Henri Guillemin.

Céline n'aime pas les Lumières. Pardi ! Voltaire : "Un pays bien organisé est celui où le petit nombre fait travailler le grand nombre, est nourri par lui, et le gouverne." Votre >> démocratie << est strictement et dans ses fondements, une oligarchie. Nous ne l'aimons pas.

Il n'aime pas la culture. Avec un grand Q - cf. Franck Lepage. Nous non plus.

Il n'aime pas la démocratie. Nous non plus - cf. Etienne Chouard.

En effet, le Voyage est toxique pour les honnêtes gens, plus encore peut-être que Bagatelles pour un massacre.

Guillemin parle de Rousseau, ça vaut pour Céline, et pour tous les pestiférés :

""Vivant ou mort, il les inquiètera toujours." Qui ça, "les" ? Bah ! les sages quoi, les raisonnables, les avisés, les gens de bien, les honnêtes gens..."

"Vous avez entendu ces trois textes, il est évident qu'il y a un ton populaire, un ton peuple, c'est pourquoi Monsieur Ferdinand Brunetière, le grand critique de la Revue des deux mondes, quand il avait parlé de Jean-Jacques, avait dit : "c'est un homme qui par ses origines est peuple, peuple au sens le plus fâcheux du mot". Vous avez compris, c'est un infréquentable, enfin quelqu'un qui n'est pas admissible parmi les gens de bien."


Et une petite citation de Céline : 
"Le vrai rideau de fer, c'est entre les riches et les miteux. Les questions d'idées sont vétilles entre fortunes égales. L’opulent nazi et l'administrateur de Suez, ils parcourent les mêmes golfs, ils ouvrent la chasse ensemble, ils soupent à Saint Moritz. Mais nous là, hâves, penailleux, trimards, mégotiers, revendicateurs, allez... à la niche."

dimanche 14 octobre 2012

Ambiance feuilles mortes

Ah ! il y a des jours comme ça. Je n'ai pas lu Chateaubriand, encore, mais j'ai entendu Desproges encenser PPDA - ça compense assurément.








J'irai donc, la jambe élancée, l'écharpe au vent mauvais frissonnant dans l'éprouvante amertume des sous-bois de l'automne, le coeur bercé d'une langueur tout à fait monotone, en dépit des saillies alpestres composant le décor, mais derrière.

Faut jouer du contraste pour le voir

Le Mont Pourri (merci Alain)

Meije, Rateau et compagnie

Les feuilles mortes se ramassent à la pelle, les châtaignes avec elles, et on n'est pas à l'abri d'un champignon ou deux. Il ne manquera que la cheminée et le crépitement du feu de bois. Chemin faisant, je ris jaune, et les pensées se mettent au diapason.



A la croisée des chemins, aux Croisettes, c'est trop tard, il n'aura pourtant pas manqué grand chose, mais les nuages noirs ont avancé plus vite que moi. Le Mont Blanc s'est effacé... terminus... fin de parcours. Autumn leaves...


vendredi 12 octobre 2012

Mea culpa

Je revois, c'est 2005, chansons et sérénades, c'est Paix ! Paix ! Paix... inter(nationalisme) encore ! européisme évidemment ! Élan ! élan... Victor Hugo grand-père, au coin du feu, et Ludwig van dans les oreilles hurle à la Joie de nous petits taureaux excités par le drapeau bleu. Ah ! étoiles d'or plein les yeux... Gott ! Gott ! Ach ! Schwester und Bruder ! Take me higher... 

Je vois, c'est 2012, débandade et tragédie, c'est Crise ! Crise ! Crise... (inter)nationalisme ligoté... le fascisme sans l'aimer ! Chute ! chut... Victor Hugo grand-père, dans les flammes de l'enfer, et Ludwig van assourdi pour nous déconfits misérables vers de terre écrasés. Ah ! règle d'or plein le dos... Allah ouakbar ! quel ramdam... Bérézina.

C'est pas qu'elle est pas belle Shéhérazade, au bout seulement de mille et une nuits, je la vois sous un autre jour. Mille folies pour Dulcinée ? Oui ! Malgré encore sa laideur, sa vulgarité, depuis que des vils magiciens lui ont jeté un sort. Dulcinée mérite que le Chevalier à la Triste Figure attaque les Géants qui ont causé sa perte. 

Qu'ont-ils donc fait de toi ? TSCG. MES. FESF. Marché Transatlantique. Qu'ont-ils donc fait de toi ? Ce qu'ils avaient prévu. Ce que nous n'avions pas compris. Tout était là. Tout y est toujours, Oubli et Propagande encore à l’œuvre, musique de fin du Titanic.

Ah ! Vive World War II ! Oh ! Vive le Goulag ! Van Rompuy ne serait jamais allé cherché le Prix Nobel... imaginez... On essaye encore, d'y croire : Printemps Arabe ! Pussy Riot ! Poutine grand méchant loup ! Kadhafi vilain ! Ahmadinejad pas beau ! On essaye. Obama il est gentil, et il a de belles dents. On essaye, on finira bien par aller se faire voir chez les Grecs. Et quand je dis "chez", abus de langage... la Grèce n'est plus aux Grecs. Fini. Terminé. Entendu ! Liquidation totale, même la mer est liquidée.

Que reste-t-il de sain ? de vivant ? Qui nous tire par les cheveux ? vers quel "théâtre d'opérations" ? Pourquoi toutes les réponses à ces questions sont trop évidentes ? Il va en falloir, de la force morale, pour ne pas y aller. Je crois que nous n'en avons plus. C'est sans doute pour cela, ce Prix. Rien ne va plus, les joueurs sont faits, passage à la Caisse, avant à tabac.

jeudi 11 octobre 2012

Dernier requiem pour les valeurs du sport ?

Je me permets simplement une petite pensée aujourd'hui pour ceux, nombreux, innombrables, qui s'offusquaient encore quand on leur disait que le sport, même depuis Festina, est complètement ravagé par le dopage, et qui doivent désormais affronter le rapport de l'USADA sur Armstrong. 

La petite chanson : il y a de plus en plus de contrôles, de plus en plus pointus, bla, bla, et reblabla.

Répétons-le inlassablement, surtout quand les faits nous donnent raison :

"On ne prend que les imbéciles et les imprudents." 

Les contrôles ne servent à rien. Plus on en fait, moins on prend de gens. Évidemment pas parce qu'ils arrêtent de se doper, mais parce qu'ils arrêtent de se faire surprendre et s'organisent mieux.

Ah ! ça va pleurnicher encore et encore sur les valeurs du sport, bla, bla, et reblabla.

samedi 6 octobre 2012

Liberté pour tous de penser comme les journalistes

TARTUFFE, il tire un mouchoir de sa poche
Ah ! mon Dieu, je vous en prie,
Avant que de parler, prenez-moi ce mouchoir.

DORINE
Comment ?

TARTUFFE
Couvrez ce voile que je ne saurais voir.
Par de pareils objets les âmes sont blessées,
Et cela fait venir de coupables pensées.


*****

Et ça a continué comme ça. Il fut un temps, on pouvait lire Rien n'est sacré, tout peut se dire, du situationniste Raoul Vaneigem, et penser que c'était là une position sinon de gauche, du moins partagée par la gauche, et a minima par l'extrême-gauche.

Répétons-le :
« Issue du libre-échange et de la libre circulation des biens et des personnes, la liberté d’expression est aujourd’hui menacée par cet esprit marchand qui avait présidé à sa naissance. »

 Ce n'est pas le despotisme qui limite désormais la liberté d'expression, c'est la >> démocratie <<
« Il est indigne que les citoyens se laissent traiter à la façon des écoliers voués à ingurgiter passivement des connaissances mortes au lieu d’être nourris d’un savoir guidé par le souci de mieux vivre. »
 
Le Spectacle assomme le citoyen d’un flot d’informations dont le tri demande d’immenses efforts et de longs apprentissages, pour se défaire de l’emprise de la propagande, de l’émotionnel, de l’insignifiant, de l’obscurantisme, du futile…

La liberté d’expression se gagne… mais n’est certainement pas un principe qu’on décrète une fois pour toute… c’est un combat quotidien, d’une part pour déconstruire la propagande du système de domination, et d’autre part pour créer, et, selon le vocable de Vaneigem, « vivre mieux ». 

La liberté d’expression présuppose, écrit Vaneigem, qu’il « n’existe ni droit ni liberté de tuer, de tourmenter, de maltraiter, d’opprimer, de contraindre, d’affamer, d’exploiter ». A partir de quoi, il ne saurait y avoir de limite à son usage, bien au contraire. Il aligne ensuite les arguments :
- la censure s’alimente elle-même ;
- on n’interdit pas l’absurdité ;
- la pensée ignoble est un symptôme d’un malaise, et ce qu’il faut condamner, c’est notre passivité à trouver un remède ;
- les pensées les plus dérangeantes empêchent d’ériger les vérités du jour en Vérité absolue ;
- l’autocritique amène à l’indifférence à l’égard des opinions des autres ;
- la haine périt d’elle-même et « l’offenseur s’expose au pilori de ses propres sarcasmes » ;
- etc.

Là où la prise de parole relève d’une instance judiciaire, c’est quand une menace est accompagnée de moyens de la réaliser… et pour ce qui concerne la protection de l’enfance. Au-delà, tout peut donc se dire, et c’est le moyen pour le citoyen « [d’]identifier ses désirs, de les exprimer, de les communiquer, de les accomplir ». C’est la condition de transformation sociale.

« La liberté d’expression est le langage restitué au vivant. »

Où en sommes-nous ? Charlie Hebdo publie une nouvelle fois des caricatures de Mahomet. Soit. M'étant désabonné, je ne les ai pas vues, et peu importe : il faut défendre leur droit à les publier.

MAIS - mais, on peut s'étonner de deux choses. La première : à gauche, certains rechignent à défendre Charlie Hebdo au prétexte que ce serait rejoindre les "fascistes". La seconde : Charlie Hebdo adore railler les sacralités des autres, mais n'envisage pas une seule seconde de s'attaquer à celles de nos sociétés. Et vous allez voir que je vais relier ces deux choses : Eric Zemmour - "fasciste" selon la bienpensance allant de Besancenot au Nouvel Obs' en passant par Charlie - explique très bien que l'hebdo ne publierait pas une caricature sur la Shoah. 

Face aux menaces, Charb est protégé par la police. Joe lecorbeau qui, lui, publie des caricatures sur la Shoah, et est également menacé, est convoqué par la police. Et, lorsqu'il tente de publier un article sur Agoravox pour dénoncer ces deux vitesses, son article n'est pas validé. Que signifie agoravox ?

Le spectre de ce qui peut se dire est extraordinairement rétréci, d'un côté par les lois mémorielles, mais surtout par le travail de sape qui consiste à nazifier de plus en plus de monde. L'accusation finira par revenir à la tête même de Pierre Nora. Imaginons la tête de l'équipée néo-nazie selon la bienpensance : Marc-Edouard Nabe, Lars von Trier, Edgar Morin, Siné, Pierre Bourdieu, Renaud Camus, Jean Bricmont, Alain Soral, Richard Millet, Dieudonné, Pascal Boniface, Noam Chomsky, Thierry Meyssan, etc. (liste pléthorique de "fascistes", "antisémites", "négationnistes", "incitateurs à la haine raciale"). C'est l'armée mexicaine attablée à l'auberge espagnole. Mais nos bienpensants ne doutent de rien et appellent ça l'amicale rouge-brune. 

*****


Et ça s'est poursuivi encore. Diam's est réapparue sur TF1. Je dois bien avouer que je ne suis pas très au faîte de l'actualité de Diam's, et que je regarde TF1 aussi souvent que je vais en vacances sur Pluton. Heureusement - si on veut, cette apparition a provoqué la fureur des médiacrates : voilée, elle fait du prosélytisme, c'est dangereux pour la jeunesse, c'est un peu comme Merah.

Alors, le rap dégénéré consumériste et inculte, ce qu'elle faisait alors qu'elle était une "star" du "showbiz", ça ce n'était pas dangereux, ni prosélyte, ni un mauvais exemple pour la jeunesse. Quand on écoute son entretien, d'ailleurs, elle explique qu'elle allait très mal, et que le rap était le moyen pour elle de faire passer son malaise sans avoir besoin d'avoir le moindre talent. Elle a tout simplement fini en zombie, ce qui n'a jamais provoqué de débat de dizaines de minutes sur les plateaux TV sur les dangers et méfaits de la Société du Spectacle. 

En revanche, maintenant qu'elle est sauvée, et manifestement apaisée, rassérénée, bien dans sa vie, c'est un affreux danger ambulant. Ils sont terrifiés les médiacrates, terrifiés. Son voile de Ben Laden leur rappelle les actes de Merah. Si, si, vous savez Merah, celui dont ils applaudissent les actes - à condition qu'ils aient lieu en Libye, en Syrie, partout... mais pas en France.

Les libertés de culte et d'expression sont devenues la liberté de penser, de croire et de dire ce que les médiacrates pensent.

*****


Et je termine comme ça : Vincent Reynouard. Lui, pour le coup, est néo-nazi, il s'en réclame explicitement. Il a été emprisonné pour ce qu'il a écrit, et est maintenant poursuivi par Riss, dessinateur à Charlie Hebdo. C'est lugubre. Professeur Choron ! Vuillemin ! Hitler = SS ! Sommes-nous si faibles ?

samedi 15 septembre 2012

Reconstruisons le Taj Mahal

Langue fantôme débute par une très bonne trouvaille littéraire autour de la figure d'Umberto Eco. Le sieur, auteur entre innombrables autres du Nom de la rose, qui s'était plaint lui aussi d'Internet où le vrai et le faux ne se distinguent pas, alors que dans un livre, un panneau est placé par Dieu devant chaque phrase, tantôt "VRAI", tantôt "FAUX", à la télévision également, le sieur a ainsi entrepris de réécrire son roman-phare à l'usage des lecteurs de la génération Internet.

Une écriture simplifiée, "plus légère et accessible", et un grossier élagage des citations latines furent pensées par le penseur - à moins que ce ne soit par son éditeur, ou quelque autre belle personne envisageant les menus profits de quelques millions d'exemplaires supplémentaires. 

On comprend mal, quoiqu'il en soit, ce qui peut pousser un écrivain à avoir un style, une philosophie, une psychologie, et autres absurdités desquelles abusèrent jusqu'à la nausée des auteurs si ringards que Dostoïevski. Franchement, son Raskolnikov, il nous prend la tête. Comment voulez-vous balancer ses "clashs" sur Twitter ? Alors, des citations latines ?! Horresco referens !... Un tel écrivain devrait être interné sur-le-champ.

Et en un sens, il faut bien donner raison à Eco : le lecteur, abruti par un gigantesque travail de sape culturel, validera son Nom de la rose pour les nuls. Alors, bravo Umberto, c'est superbe. Pour garder des lecteurs, les écrivains détruisent ce qu'il leur restait de littéraire. 

Péguy écrivait, contre les Républicains, qu'il est important que les Républicains l'emportent, certes, mais qu'il est plus important encore que les Républicains soient effectivement Républicains. Ça nous la baille belle que la >> littérature << se vende encore : elle n'a plus rien de littéraire. 

De la même façon, je pense que les touristes n'iront plus admirer le Taj Mahal, monument beaucoup trop beau et trop complexe pour l'humain du XXIe siècle. Je propose donc qu'on le rase, lui aussi, et qu'on le reconstruise de manière à le rendre plus léger et accessible : 

Le futur Taj Mahal, accessible à homo twitterus

mercredi 12 septembre 2012

Lettre ouverte à Monsieur Millet

Monsieur Millet,

Permettez-moi de vous appeler Monsieur, j'y suis quasiment contraint par d'étranges forces qui me poussent au respect, plus encore que par mon souci, toujours présent, de la Bienséance. 

Une armée de fantastiques Géants, venus aussi bien de l'ouest que de l'est, du haut et du bas, vous attaque, courageusement, à mille contre un. Nous commençons à les bien connaître, ils nous surprennent pourtant éternellement, capables de surpasser leurs exploits à chaque bataille - et ils en mènent, des batailles. C'est qu'ils ont la machinerie moderne pour les conduire, alors que notre pauvre, pauvre, Rossinante commence à fatiguer. 

Je suis de gauche démocrate anti-raciste et internationaliste. Tout devrait donc me pousser contre vous, et dans le camp du Bien, des belles personnes, des bienpensants, des honnêtes gens, des gens de bien, et pourtant : non. Eux aussi se proclament cependant de gauche, démocrates, anti-racistes, internationalistes. 

Je le répète, les honnêtes gens en mènent, des batailles. J'ai pu comprendre, au fil des années, et des défaites, qu'ils ne parlaient pas la même langue que moi. 

Ça a débuté comme ça : Edgar Morin était attaqué pour "incitation à la haine raciale". Et pourquoi pas Gandhi, tant qu'on y est ? D'autres affaires, innombrables, du même acabit, avant et après l'affaire Morin, firent monter la crispation. Le cas Dieudonné est exceptionnel : un métis qui se pense comme tel (donc un pont entre deux continents, deux cultures, donc une négation vivante du racisme) dont le patronyme est devenu synonyme de racisme, quoi de plus tragi-comique ? Mais l'histoire est pleine de ces grands renversements, de ces transferts. Il est facile d'accuser l'Autre d'être ce que nous ne voulons pas voir que nous sommes.

Je ne vous avais encore pas lu. Je vous avais entendu, je crois, dans l'émission Ce soir ou jamais, à propos de cette désormais fameuse complainte du seul blanc. Je n'en avais rien pensé de particulier, si ce n'est que c'est une chanson qui ne peut me toucher. Je ne suis pas attentif à ces détails, je ne les remarque pas, et je suis incapable de réduire un individu à une quelconque communauté. Je crois que je suis nietzschéen par réflexe : dans "Deviens ce que tu es", le terme important est "deviens". Un Homme à la peau noire n'est pas noir tant qu'il ne l'est pas devenu. Sous le regard éhonté du colonisateur (lequel était de centre-gauche, ce conflit idéologique ne date pas d'hier, et j'estime ainsi mon positionnement tout à fait cohérent dans ma critique du racisme et du colonialisme depuis Jules Ferry jusqu'à SOS Racisme), il est devenu nègre. La négritude et le jazz font plus pour ridiculiser le colonialisme que toute la bienpensance anti-raciste réunie - et pour cause !

Ce qui m'intéresse donc chez les autres, c'est leur devenir, leur liberté, pas leur passé ni leur communauté. Je suis d'ailleurs tout à fait infirme quand il s'agit de décrire une personne, avant que cette personne ne m'ait révélé sa façon de se décrire. Quand bien même, je vis dans un quartier assez peu blanc, idem dans mon travail, je n'écoute quasiment que de la musique de nègres et de bougnoules, et j'aime ça. Je suis, je l'espère, curieux de l'Autre, et les ponts historico-géographiques qui nous permettent de les rencontrer, de les connaitre, c'est là une chance. Je ne me suis jamais interrogé, en tant que "seul blanc", et même après réflexion, ça me paraît tout à fait incongru. Obama est plus blanc que Jean Genet, non ? Ah ! j'exagère ?! C'est à cause de Nabe.

Vous enfoncez d'ailleurs le clou, cet été, avec vos pamphlets, et toujours la complainte du seul blanc. Mais cette fois-ci, l'acharnement médiatique contre vous dépasse l'entendement. Toute la bienpensance déglinguée rivalise d'abjection. Tout y passe : vous faites de Breivik un héros, vous êtes raciste, vous insultez la mémoire des victimes, vous êtes fasciste. Des témoins vous auraient vu à plusieurs reprises chez Marc Dutroux, et des amis d'enfance déclarent - horresco referens ! -  que vous torturiez déjà des chats pendant les récréations à l'école. 

Je ne supporte plus ces médiacrates, leur propagande et leur tartuferie, de laquelle Molière lui-même s'étonnerait. Il me fut surtout pénible d'encaisser la chronique de Fabrice d'Almeida sur France Inter, lui qui est historien, et spécialiste des médias et de la propagande. Il est lugubre, lugubre de penser qu'il peut, malgré cela, servir la plus infecte soupe propagandiste sauce Val, préparée du mélange Millet, Dieudonné, Faurisson, Céline, avec pour résultat une clownerie iconoclaste et néanmoins nazifiée.

Quant au coup de grâce, c'est bien entendu au journal Le Monde qu'il revenait de le donner. Après les sous-fifres de itélé, des Inrocks, et compagnie, c'est la maison-mère qui attaque. Trouver 119 écrivains, 119 écrivains !... pour fustiger avec Annie Ernaux votre "fascisme", aucun écrivain au monde n'aurait pu l'imaginer. Cette fois-ci, les choses sont claires, le fond est touché, la partie est terminée, Babylone est brûlée, en cendres. Les mots n'ont plus de sens. La guerre c'est la paix. 

Ils s'y mettent à 119, et pas un, pas un, pas un de ces 119 écrivains n'a compris l'ironie du titre, ne sent que l'anéantissement de la littérature par le Nouvel Ordre moral, selon votre expression, est la condition sine qua non de l'émergence d'un Breivik, et donc que la situation logique, non ironique, voudrait que ce soit un cultureux mondain et mondialiste qui fasse l'éloge de Breivik. Quant à l'écrivain, dinosaure de la littérature, les faits lui ayant donné raison (la montée de l'insignifiance conduisant entre autres à des pratiques terroristes monstrueuses), il ne peut que redoubler de virulence dans ses alertes, ce que le Nouvel Ordre moral, pour se perpétuer, ne peut que prendre comme une justification et un éloge du monstre terroriste. Le piège est terrible, et magnifiquement déjoué par l'ironie de votre titre.

Pas un de ces 119 écrivains n'a le moindre commentaire à faire sur le contenu de vos trois pamphlets. L'histoire littéraire du XXe siècle, la théorie du Spectacle, celle des simulacres de Baudrillard, le rôle de Mai 68, les relations entre les médias, le Culturel et la politique, l'industrie culturelle, l'illusion démocratique, la surestimation totalitaire, Lévi-Strauss, René Girard, rien, il n'y a rien de pertinent à dire. En un sens, je m'en félicite, et vous aussi, assurément, c'est toujours ça de "débat" et de "commentativite" en moins.

La littérature, la langue, l'altérité ? il n'y a personne non plus, ces sujets n'existent pas. Il est beaucoup plus important de chasser le racisme. Pourtant, en cherchant bien, le racisme pourrait être trouvé là où ils ne l'attendaient pas. Vos livres transpirent en effet d'une idée centrale : la défense de l'altérité et la critique de l'indifférentiation. Vous pleurez la disparition de l'Autre. C'est du racisme, ça ? C'est d'extrême-droite, ça ? Si on prend cette propagande au pied de la lettre, cela signifie alors que l'anti-racisme, c'est la tolérance de tous (ceux qui boivent du Coca, écoutent de la pop, et lisent le Da Vinci Code). Quel magnifique exploit que de tolérer le même ! Quel humanisme ! Quel raffinement ! Si j'osais, je citerais la première phrase de Bagatelles pour un massacre. Boum ! Vrang !

Vous vous affirmez au fil des pages comme défenseur de la biodiversité des idées et des cultures. Grâce notamment à Péguy, j'en comprends bien les implications. Je me disais internationaliste - mais pour aller à la rencontre, et au-delà des nations, il faut bel et bien que les nations existent. L'inter-nationalisme, ce n'est pas le mondialisme, c'en est le contraire : l'échange dans l'altérité d'un côté, et la communication globish de l'autre. 

J'en finis, maintenant. Les honnêtes gens ne sont pas démocrates, ils sont voltairiens ; ils ne sont pas internationalistes, ils sont mondialistes ; ils ne sont pas de gauche, ils sont l'instrument de résignation sociale du capitalisme financier. Pasolini nous répèterait que là est le vrai fascisme. C'est pourquoi il est extrêmement important pour eux que leurs opposants passent pour fascistes, d'extrême-droite, racistes. 

Nous le savons. Soyons les plus forts. Enfilons le heaume de Mambrin. Et en avant !

"En avant. […] Puissé-je ne rien garder à mes semelles de tout ce que je quitte, et ne rien emporter que mes belles douleurs, mes belles conquêtes, toutes mes victoires sur moi-même en tant de combats où j’ai été vaincu selon le monde, défait par la laideur et révolté par le bruit. […] En avant !"
André Suarès

Très cordialement,

mardi 11 septembre 2012

Altérité, racisme et anti-racisme

Je tourne autour depuis quelques temps, et je les ai désormais lus, les pamphlets de Richard Millet. J'en donne les titres, ne serait-ce que pour la polémique qu'ils ont créée - à juste titre, c'est à propos, d'ailleurs, puisqu'ils sont aussi le sujet : la littérature. 

Langue fantôme

Éloge littéraire d'Anders Breivik

De l'antiracisme comme terreur littéraire 


Je me suis déjà agacé du traitement subi par Millet, à la sauce Inrocks aussi indigeste qu'à la sauce itélé. La logique était alors ô combien respectée, les médias peuvent en effet facilement être amalgamés autour de la même bienpensance, mais entre ces deux-là, le meilleur des microscopes ne permettrait pas de déceler la moindre différence idéologique. 

France Inter s'est également occupée de son cas. Qui pourrait s'en étonner ? Moi pas, qui ai Philippe Val dans le collimateur, alors qu'on peut même estimer que sans lui, Millet aurait de toute façon reçu le même accueil sur cette station. C'est Fabrice d'Almeida qui s'y est collé, et qui justifie la citation comme témoin de Val, tant sa critique singe celle de l'ancien patron de Charlie Hebdo.

Fabrice d'Almeida est historien. Je trouve toujours désagréable de devoir critiquer un historien, et pourtant il faut bien le faire. Je veux dire : en tant qu'historien, on est confronté nuit et jour, pour ainsi dire, à des constructions plus ou moins mythologiques, il faut démêler le vrai du faux, recouper, confronter, c'est terrible. Il y a donc une chose à laquelle l'historien devrait être naturellement attentif : ne pas servir la soupe propagandiste. L'historien ne peut pas être objectif, c'est absurde. Il ne peut pas, non plus, dire la Vérité, c'est tout aussi dénué de sens. Il peut, en revanche, comme le lui demandait Victor Hugo, dire "le vrai", c'est-à-dire ne pas mentir. C'est peu, et c'est tant !

Fabrice d'Almeida est un spécialiste des médias et des manipulations. Vous trouverez les divers ouvrages qu'il a écrit sur le sujet. Et là, je dois l'avouer, j'en suis complètement déprimé. Il me parait insensé, mais complètement extravagant, c'est un défi à tout sens logique, qu'un spécialiste de la Propagande dans l'histoire, nous offre une chronique aussi visiblement affiliée à la Propagande du pouvoir actuel. C'est désespérant. 

J'ai honte, j'ai honte pour lui, quand j'entends sa chronique. Peut-être n'a-t-il pas lu les pamphlets de Millet, je l'espère sincèrement. Vendredi, quelqu'un lui a envoyé par e-mail les trois extraits dont se gargarisent les médias, et samedi matin il a fait sa chronique dessus. Est-il possible qu'il en soit autrement ?

Éloge littéraire d'Anders Breivik. Millet précise que l'ironie du titre n'a pas été saisie par les médiacrates. Il a raison. Imagine-t-on Millet la mitraillette à la main ? Il a une plume ! L'ironie : l'anéantissement de la littérature par le Nouvel Ordre moral amène à l'insignifiance, condition sine qua non de l'émergence d'un Breivik, et l'écrivain médusé dont les faits valident son diagnostic ne peut que redoubler de virulence contre ce Nouvel Ordre moral, lequel aura vite fait d'assimiler l'écrivain au terroriste, dans une inversion, dans un grand renversement si classique. 

Pour être plus clair : Breivik n'aurait pas été Breivik dans un monde où la littérature, la langue, l'altérité auraient encore été des valeurs. Ce sont donc les ennemis de la littérature, de la langue, de l'altérité qui pourraient avoir à répondre de Breivik, qui pourraient avoir à se justifier de ne pas l'avoir fait apparaitre. Mais c'est la littérature, la langue, l'altérité, l'écrivain qui se retrouvent accusés de sympathie, de collusion, d'approbation pour Breivik.

Hélas ! Fabrice d'Almeida ne l'a pas compris, et confond qui plus est ironie et comique, pour ne retenir qu'une chose de ces trois pamphlets : Millet est un humoriste, un clown, enfin quelqu'un de pas sérieux, et assez dangereux pour tout dire, avec ses idées nauséabondes. Tiens, mais, c'est comme Dieudonné. C'est parti pour un tour de grand huit. Dieudonné, c'est un bouffon. Comme dans une cour de maternelle, Fabrice d'Almeida pense décocher une flèche empoisonnée en direction de Millet, lequel se prendrait pour un grand écrivain, alors qu'il ne vaut pas mieux qu'un pauvre bouffon. Et la compagnie d'un nègre lui sera sans doute difficile à supporter, doit penser Fabrice. 

Ce qui me vient d'abord à l'esprit, c'est que sur une radio qui se veut de qualité, dans une émission où un historien tient une chronique sur les controverses de l'histoire, l'historien en question, invité à parler de trois livres, ne trouve rien de sérieux dans ces trois livres, mais uniquement de la bouffonnerie nauséabonde. L'histoire littéraire du XXe siècle, la théorie du Spectacle, celle des simulacres de Baudrillard, le rôle de Mai 68, les relations entre les médias, le Culturel et la politique, l'industrie culturelle, l'illusion démocratique, la surestimation totalitaire, Lévi-Strauss, René Girard, rien, il n'y a rien de pertinent à dire pour un spécialiste des sciences "humaines" ? Bon, d'accord...

"[...] la culture occidentale vouée à ne plus exister que sous deux formes : des écrits qu'on qualifiera de dissidents (ou, pour parler comme Pasolini, d'hérétiques) et un divertissement généralisé, capable d'inclure dans son économie sa critique "urgente" et bien entendu consensuelle, de quoi la nullité de l'art contemporain, par exemple, ou celle, revenons-y, du roman, est exemplaire, qui fait de la rébellion le fondement de son geste, lequel est dès lors sacralisé comme "dérangeant", maître mot de ce qui tient lieu de critique littéraire, en France." - Langue fantôme

Rien à dire là-dessus, Fabrice ? Puisque les médias aiment les débats, que Millet déteste (il a raison ! la littérature est l'anti-débat), ces livres offrent mille et une occasions de "débats". Et pourtant...

Ce qui me semble central, dans ces trois pamphlets, est la question de l'altérité. Millet défend la littérature comme altérité, contre le Culturel mondialisé et indifférencié. Ce qu'il combat, c'est le globish, ce qu'il défend, l'anglais, l'italien, l'espagnol, le français, etc. Il pleure la disparition de l'Autre. C'est du racisme, ça ? C'est d'extrême-droite, ça ? Si on prend cette propagande au pied de la lettre, cela signifie alors que l'anti-racisme, c'est la tolérance de tous (ceux qui boivent du Coca, écoutent de la pop, et lisent le Da Vinci Code). 

Pourtant, il y a autre chose, dans la vie. Il y a autre chose, dans le monde. Quand il s'agit des papillons ou des ours, la bienpensance est tout à fait d'accord (en surface tout au moins) pour préserver la biodiversité. En revanche, la biodiversité des idées, des cultures, il est devenu raciste d'y être attaché. 

Je n'ai aucun intérêt à démontrer que Richard Millet n'est pas raciste. Je n'éprouve aucune difficulté à admirer Louis-Ferdinand Céline malgré le racisme vociférant de ses pamphlets, je n'ai pas à partager les idées des écrivains, des musiciens, etc. Je sais faire la part des choses. Toutefois, je pense qu'il ne l'est pas, et il me semble très problématique qu'il soit jugé unanimement raciste par la médiacratie. Fabrice d'Almeida n'a pas tort en fin de compte de le rapprocher de Dieudonné ; c'est le même cas, la même inversion. A force de procéder ainsi, de faire un grand amalgame de gens si divers, d'extrême gauche, d'extrême droite, de droite, de gauche, de tous les nazifier de manière aussi ridicule, l'extrême-centre bienpensant va finir par se retrouver bien à l'étroit. Ce sera la révolution...


P.-S. : il y a pire encore qu'un historien des médias, comme Torquemada. Le Monde a trouvé 119 écrivains, 119 écrivains !... pour fustiger avec Annie Ernaux le "fascisme" de Richard Millet. Au secours !

lundi 10 septembre 2012

Ma rentrée littéraire

Je fus quasiment incapable de répondre à la question : "quel est le dernier livre que tu as lu ?" J'en fus tout perturbé et effrayé. Oh ! certes, j'ai fini par retrouver D'un retournement l'autre, de l'ami Frédéric Lordon, lequel a le défaut d'être économiste, mais défaut largement compensé par son adoration, à juste titre (parce que Philippe Val aussi l'adore), pour Spinoza, ainsi que pour Céline puisque le titre rend hommage à l'élusion célèbre de D'un château l'autre.

Rentré chez moi, je retrouvai une pile de livres relus, partiellement ou non, récemment, ce qui eut un effet légèrement rassurant. Et puis, j'ai toujours le Journal de Léon Bloy et Au régal des vermines de Marc-Edouard Nabe, en cours, c'est vrai.

Et finalement, la rentrée littéraire n'est arrivée à moi que par le skandal Richard Millet, dont je n'ai pas fini de parler. Pour me rattraper, j'ai commencé par aller acheter les pamphlets scandaleux. Il me fallut donc aller en librairie, et la parcourir - les parcourir. 

On y remarque qu'un kilogramme de lessive est offert pour trois livres du Guillaume Lévy achetés. Je cèderai lorsque ce sera de la lessive bio, ce qui ne saurait tarder. Je feuillette alors quelques livres de la "rentrée littéraire", le livre d'Angot, par exemple. Je recommence : 

Un kilo. De lessive. Trois livres. Guillaume Lévy. Pas de la lessive bio. Pas encore. Bientôt. D'autres livres de la rentrée littéraire. Angot. Par exemple. 

Je ne me souvenais plus ce que je n'aimais pas dans son écriture. J'ai vite trouvé. Des "phrases" nominales. Millet en parle, d'ailleurs, on se demande bien qui il cible...

Ecoeuré, je me rends au rayon "Littérature française". "A, comme Artaud", pensai-je naïvement. Mais Antonin Artaud n'a pas l'heur de figurer dans les rayons de cette librairie, ni dans les deux autres parcourues ce jour. Je suis persévérant, jusqu'à une certaine limite, c'est entendu. "B comme Bloy, ou Bernanos" ! Rien ! Il n'y a rien, absolument rien. La littérature française se passera d'eux. 

Guy Debord, reviens !

samedi 8 septembre 2012

Ma petite Nelly - du racisme et de l'anti-racisme

N'importe quel rapace a mille et une fois plus d'allure qu'un médiacrate. 

Sans doute avez-vous remarqué qu'ils me fatiguent. 

Leur dernier méfait fut de s'en prendre à Richard Millet. 

Attention je vais citer : 





"Dans le fond et la forme, ses pamphlets rappellent ceux, antisémites, de Céline : même litanie haineuse, nationaliste, paranoïaque, suicidaire."
Nelly Kaprièlian, Les Inrocks, 29 août 2012

Ah ! Nelly... Nelly ! Nelly... "Le monde est plein de gens qui se disent raffinés et puis qui ne sont pas, je l'affirme, raffinés pour un sou". Oui, parce que j'ai lu les pamphlets, antisémites, de Louis-Ferdinand Céline. Qui s'étonnera que je pense à toi, Nelly, en lisant cette phrase pour ainsi dire introductrice de Bagatelles pour un massacre ? Ah, ces raffinés ! les bien-pensants ! Les hommes de bien ! (ou les femmes, si tu veux, Nelly...) - les honnêtes gens ! les belles personnes... Ils sont démocrates, tolérants, anti-racistes, l'axe du Bien finalement.

Prenons-la au mot, et commençons par la forme. Je vais chercher dans "le plus abject" (dixit Nelly) des trois pamphlets de Millet (De l'antiracisme comme terreur littéraire), et je vous fais juges : 

"Il existe dans toute nation une identité onomastique, laquelle est aujourd'hui bradée, en France, avec la langue, les journalistes et les écrivains ayant renoncé à nommer le monde en français pour en adopter la version anglo-saxonne et signifier à l'Empire leur consentement à la condition de sous-homme américain : comment, dans ces conditions, les immigrés extra-européens désireraient-ils s'assimiler à des vaincus qui aiment leur propre défaite ?" (De l'antiracisme..., page 35)

et 

"- Intelligents, quoi ?... que je m'insurge. Ils sont racistes, ils ont tout l'or, ils ont saisi tous les leviers, ils se cramponnent à toutes les commandes... C'est ça leur intelligence ?... Y a pas de quoi reluire !... Ils se filent admirablement le train, ils éliminent, dégoûtent, pourchassent, traquent... tout ce qui peut rivaliser, leur porter le plus petit ombrage... [etc.]" (Bagatelles)

Qu'un critique littéraire, quelqu'un de sérieux !... vienne m'expliquer en quoi la forme du premier extrait rappelle celle du second. Penaud, je cherche, je cherche sans comprendre, sans repérer la moindre ressemblance formelle. Aidez-moi !

Peut-être aurais-je plus de succès, si je m'occupais du fond. A priori, ça paraît logique. Les Inrocks sont anti-racistes. Alors réfléchissons : s'ils s'attaquent à quelqu'un, c'est qu'il est raciste, et certainement même antisémite et hitlérien. Oui, c'est tout à fait logique. Et qui, dans la littérature française, rappelle mieux ces heures-les-plus-sombres-de-notre-histoire ? Céline ! 

Hélas ! mille et mille fois hélas ! Céline déploie des efforts surhumains pour étaler racisme et antisémitisme à toutes les sauces. C'est à un point tel que certains (Gide) ne l'ont pas pris au sérieux, et d'autres estiment qu'il a voulu être le plus grand antisémite de tous les temps. Le racisme, dans les pamphlets, ne revient jamais par la fenêtre : il n'a jamais été mis à la porte. Mais chez Millet ? c'est tout le contraire ! Le sieur passe son temps à nier son racisme, c'est-à-dire à nier une hiérarchie de races humaines ; cependant qu'il défend sa position que l'on peut qualifier de conservatisme identitaire - les musulmans en musulmanie, les chrétiens en chrétienté. C'est son truc.

Alors sur le fond, je me sens tout aussi bête. Nelly, éclaire-moi ! 

Oh ! certes il y a des points communs. Millet s'oppose à l'homogénéisation mondialiste par la sous-culture pop anglo-saxonne. Céline aussi. Mais combien d'autres ? Tous ceux qui aiment Beethoven, Thelonious Monk, Ravi Shankar, Oum Kalsoum, etc. mais pas le globish. Idem en littérature, architecture, cuisine, tout ce que vous voulez. Il suffit d'être curieux de l'Autre, et le rejet du Nouvel Ordre Mondial est évident, épidermique. Et c'est cela, que la bienpensance appelle aujourd'hui "racisme" : la curiosité de l'Autre (car il faut bel et bien que l'Autre existe, qu'il y ait des différences). 

On peut donc se demander pourquoi on invoque Céline pour le cas Millet. Est-ce par ignorance ? Nelly, je ne puis le croire. Est-ce par malfaisance ? Nelly, je ne puis le croire. Est-ce alors par stupidité ? Nelly, je ne puis le croire. 

Je reste idiot. En attente d'une explication, je ne peux que me contenter d'en montrer les conséquences. Tout écrivain s'attaquant au mythe de l'indifférentiation (tout écrivain, en somme) sera taxé de racisme, ce qui revient à appeler à un monde où nous serons tous identiques, clonés, robotisés. Donnons-leur raison, il n'y aura, alors, plus de racisme. Permettons-nous de nous étonner du moyen employé : pour supprimer la pédophilie, supprimons les enfants ; pour échapper à la maladie, euthanasions les malades ; et donc, pour abolir le racisme, supprimons les races. 

J'ai peur, j'ai peur de sombrer tragiquement dans le racisme le plus primaire, mais je préfère, moi, qu'il y ait des blancs, des noirs, des métisses bien sûr, des grands, des petits, des musulmans, des athées, des hindous, des Russes, des Portugais, des royalistes, des anarchistes, des hommes, des femmes, des...

Et Reggiani, quel raciste lui aussi qui voulait rencontrer des enfants des femmes des grands hommes des petits hommes des marrants des tristes des très intelligents et des cons, c'est drôle les cons, c'est comme le feuillage au milieu des roses. 

Nelly, Nelly, tu ne peux être sérieuse... Je me trompe où je dépasse ton anti-racisme par la gauche ?


samedi 1 septembre 2012

Oh mon Dieu ! je suis devenu raciste

J'ai peur du noir
Horresco referens !... je frémis en l'écrivant. C'est pourtant vrai. Je n'ai pas encore lu Richard Millet, dont les pamphlets ont "la forme et le fond" de ceux de Louis-Ferdinand Céline, dixit Les Inrocks (soit à peu près l'équivalent moderne du Saint Tribunal de l'Inquisition), mais l'écouter dix minutes ont suffit.

Le terrain était assurément propice, depuis ma lecture des-dits pamphlets. Mea culpa ! Bagatelles pour un massacre ! L'école des cadavres ! Les beaux draps ! N'en jetez plus ! Je me suis laissé piéger à l'époque. J'étais seul, trop seul, je les ai lus - je n'aurais pas du, mais comme pour ne me laisser aucune chance, je les ai lus sans aucun Journaliste ni Intellectuel au-dessus de mon épaule pour m'arrêter avant de sombrer dans la folie antisémite carabinée. J'aurais du contacter... peut-être pas Bernard-Henri, mais au moins Philippe Val. Je n'aurais pas tourné fou ! Aujourd'hui, c'est terrible. Tout le monde sont juifs, je suis complètement paranoïaque, et même les psys sont juifs ! Oh ! misère... Enfer et damnation... 

Mais ce n'était rien encore, comparé à ce que je vis depuis hier. Mon racisme s'est étendu. J'ai entendu la complainte du seul blanc. (Im-)médiatement, mon sang aryen n'a fait qu'un tour. Encore une fois, j'ai commis l'erreur fatale : j'ai écouté l'infâme Richard seul. Quelle abomination ! Son angoisse m'a envahi. Et je me suis identifié à lui, totalement, mais complètement. Je vis, depuis lors, un affreux cauchemar. C'est vrai, je suis moi aussi le seul blanc, le seul blanc dans mon appartement. Je ne cesse de trembler. Je n'ose à l'heure actuelle pivoter sur ma chaise. Une horde de nègres barbares et cannibales me scrute et n'attend que le moment propice pour me dévorer. Du coin de l’œil, je les observe. Jugez plutôt - et appelez vite la police pour me délivrer : il y a là Miles Davis, Louis Armstrong, Charlie Christian, Thelonious Monk, Sonny Rollins, Milt jackson, Art Blakey, Cannonball Adderley, Wayne Shorter, Charlie Parker, Duke Ellington, Sydney Bechet, Dizzy Gillespie, Oscar Peterson, Yusef Lateef, Chet Baker, Bud Powell, ils sont tous noirs !, Ahmad Jamal, Archie Shepp, Billie Holliday, Ella Fitzgerald, il y a même des négresses mon Dieu !, Charlie Mingus, Ornette Coleman, John Coltrane, encore et encore !... Anthony Braxton, Geoffrey Oryema, Nat King Cole, J.-B. Lenoir, Lester Young, Count Basie, Wes Montgomery, Albert Ayler, d'autres encore mais je souffre trop, j'agonise d'angoisse à les citer

Pire encore, si c'était Dieu possible, ceux qui ne sont pas noirs, sont, j'ose à peine l'écrire, d'infâmes bougnoules ! Oum Kalsoum ! mon cœur se serre, j'ai l'impression que mon appartement va être soufflé dans un attentat, commis par quelque Anouar Brahem, Khaled AlJaramani, Ali Reza Ghorbani ! Nusrat Fateh Ali Khan ! même des Iraniens bordel ! Faiz Ali Faiz... Ibrahim Maalouf...  Ustad Mahwash, etc. 

J'ai encore l'impression que d'autres pourraient s'allier à eux pour m'agresser : des romanichels, des latinos, des Mongols ! autant avoir Gengis Khan directement dans sa cuisine, prêt à vous égorger. La touche finale, bien sûr, c'est que parmi les quelques disques de rock qu'il me reste, s'impose... Noir désir. Je pleure.

Je suis pris au piège. Je ne peux même pas sortir. A Mermoz-Laennec, figurez-vous que c'est plein de nègres et de bougnoules. Affreux, affreux, affreux ! 

Tout ça à cause d'une vidéo ! J'essaye, j'essaye de surmonter - je n'y parviens pas. Je remets la vidéo, je coupe le son quand Richard Millet parle, et je bois les paroles des journalistes. Rien n'y fait ! c'est trop tard. Encore un peu, et je commande des armes pour faire un carnage. Tout ça parce que ce malfaiteur de l'humanité a fait de Breivik un héros. Les journalistes veillent, mais n'ont pas le pouvoir, hélas ! de brûler ces sorcières modernes qui exercent une si mauvaise influence sur nos cerveaux populo sans défense. Voltaire demandait la tête de Rousseau qui propageait des idées scandaleusement démocratiques dans ses livres, dont auraient pu s'inspirer les rues basses de Genève. Restaurons la guillotine. Que Millet serve d'exemple ! On en trouvera bien 105 autres, en hommage à la restauration thermidorienne. Internet pullule de mécréants de la pire espèce : populistes, fascistes, conspirationnistes, ce n'est pas ça qui manque. 

Appelons enfin de nos vœux la création d'un Tribunal de la Bienpensance, financé par Goldman Sachs, Total et Coca Cola, et dirigé par un collège de journalistes cooptés lors du Dîner du Siècle. Plus aucun pauvre ne doit mal penser.

Sic transit gloria mundi, amen.