N'importe quel rapace a mille et une fois plus d'allure qu'un médiacrate.
Sans doute avez-vous remarqué qu'ils me fatiguent.
Leur dernier méfait fut de s'en prendre à Richard Millet.
Attention je vais citer :
"Dans le fond et la forme, ses pamphlets rappellent ceux, antisémites, de Céline : même litanie haineuse, nationaliste, paranoïaque, suicidaire."Nelly Kaprièlian, Les Inrocks, 29 août 2012
Ah ! Nelly... Nelly ! Nelly... "Le monde est plein de gens qui se disent raffinés et puis qui ne sont pas, je l'affirme, raffinés pour un sou". Oui, parce que j'ai lu les pamphlets, antisémites, de Louis-Ferdinand Céline. Qui s'étonnera que je pense à toi, Nelly, en lisant cette phrase pour ainsi dire introductrice de Bagatelles pour un massacre ? Ah, ces raffinés ! les bien-pensants ! Les hommes de bien ! (ou les femmes, si tu veux, Nelly...) - les honnêtes gens ! les belles personnes... Ils sont démocrates, tolérants, anti-racistes, l'axe du Bien finalement.
Prenons-la au mot, et commençons par la forme. Je vais chercher dans "le plus abject" (dixit Nelly) des trois pamphlets de Millet (De l'antiracisme comme terreur littéraire), et je vous fais juges :
"Il existe dans toute nation une identité onomastique, laquelle est aujourd'hui bradée, en France, avec la langue, les journalistes et les écrivains ayant renoncé à nommer le monde en français pour en adopter la version anglo-saxonne et signifier à l'Empire leur consentement à la condition de sous-homme américain : comment, dans ces conditions, les immigrés extra-européens désireraient-ils s'assimiler à des vaincus qui aiment leur propre défaite ?" (De l'antiracisme..., page 35)
et
"- Intelligents, quoi ?... que je m'insurge. Ils sont racistes, ils ont tout l'or, ils ont saisi tous les leviers, ils se cramponnent à toutes les commandes... C'est ça leur intelligence ?... Y a pas de quoi reluire !... Ils se filent admirablement le train, ils éliminent, dégoûtent, pourchassent, traquent... tout ce qui peut rivaliser, leur porter le plus petit ombrage... [etc.]" (Bagatelles)
Qu'un critique littéraire, quelqu'un de sérieux !... vienne m'expliquer en quoi la forme du premier extrait rappelle celle du second. Penaud, je cherche, je cherche sans comprendre, sans repérer la moindre ressemblance formelle. Aidez-moi !
Peut-être aurais-je plus de succès, si je m'occupais du fond. A priori, ça paraît logique. Les Inrocks sont anti-racistes. Alors réfléchissons : s'ils s'attaquent à quelqu'un, c'est qu'il est raciste, et certainement même antisémite et hitlérien. Oui, c'est tout à fait logique. Et qui, dans la littérature française, rappelle mieux ces heures-les-plus-sombres-de-notre-histoire ? Céline !
Hélas ! mille et mille fois hélas ! Céline déploie des efforts surhumains pour étaler racisme et antisémitisme à toutes les sauces. C'est à un point tel que certains (Gide) ne l'ont pas pris au sérieux, et d'autres estiment qu'il a voulu être le plus grand antisémite de tous les temps. Le racisme, dans les pamphlets, ne revient jamais par la fenêtre : il n'a jamais été mis à la porte. Mais chez Millet ? c'est tout le contraire ! Le sieur passe son temps à nier son racisme, c'est-à-dire à nier une hiérarchie de races humaines ; cependant qu'il défend sa position que l'on peut qualifier de conservatisme identitaire - les musulmans en musulmanie, les chrétiens en chrétienté. C'est son truc.
Alors sur le fond, je me sens tout aussi bête. Nelly, éclaire-moi !
Oh ! certes il y a des points communs. Millet s'oppose à l'homogénéisation mondialiste par la sous-culture pop anglo-saxonne. Céline aussi. Mais combien d'autres ? Tous ceux qui aiment Beethoven, Thelonious Monk, Ravi Shankar, Oum Kalsoum, etc. mais pas le globish. Idem en littérature, architecture, cuisine, tout ce que vous voulez. Il suffit d'être curieux de l'Autre, et le rejet du Nouvel Ordre Mondial est évident, épidermique. Et c'est cela, que la bienpensance appelle aujourd'hui "racisme" : la curiosité de l'Autre (car il faut bel et bien que l'Autre existe, qu'il y ait des différences).
On peut donc se demander pourquoi on invoque Céline pour le cas Millet. Est-ce par ignorance ? Nelly, je ne puis le croire. Est-ce par malfaisance ? Nelly, je ne puis le croire. Est-ce alors par stupidité ? Nelly, je ne puis le croire.
Je reste idiot. En attente d'une explication, je ne peux que me contenter d'en montrer les conséquences. Tout écrivain s'attaquant au mythe de l'indifférentiation (tout écrivain, en somme) sera taxé de racisme, ce qui revient à appeler à un monde où nous serons tous identiques, clonés, robotisés. Donnons-leur raison, il n'y aura, alors, plus de racisme. Permettons-nous de nous étonner du moyen employé : pour supprimer la pédophilie, supprimons les enfants ; pour échapper à la maladie, euthanasions les malades ; et donc, pour abolir le racisme, supprimons les races.
J'ai peur, j'ai peur de sombrer tragiquement dans le racisme le plus primaire, mais je préfère, moi, qu'il y ait des blancs, des noirs, des métisses bien sûr, des grands, des petits, des musulmans, des athées, des hindous, des Russes, des Portugais, des royalistes, des anarchistes, des hommes, des femmes, des...
Et Reggiani, quel raciste lui aussi qui voulait rencontrer des enfants des femmes des grands hommes des petits hommes des marrants des tristes des très intelligents et des cons, c'est drôle les cons, c'est comme le feuillage au milieu des roses.
Nelly, Nelly, tu ne peux être sérieuse... Je me trompe où je dépasse ton anti-racisme par la gauche ?
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