Vu Die Welle hier soir. Difficile d'exprimer un avis, même après cette nuit supposée, d'après l'une de ces débiles expressions clé en main (tiens en voilà encore une), porter conseil. En fait, il est clair que je n'ai pas aimé plein de choses. Et tout aussi clair que j'en ai trouvé pas mal d'autres intéressantes. Essayons donc de rassembler tout cela, si possible dans le désordre. Que ceux qui auraient envie de voir ce film aillent surfer ailleurs, mieux vaut revenir après l'avoir vu.
Puisque je parle de désordre, commençons par le tour joué aux anarchistes. Car il y a des anarchistes dans ce film. Oui. Il y a un groupe de gros blaireaux, parfaitement lamentable, dont le plus dur des énergumènes revient manifestement des genoux de sa maman où il a pleuré parce que des méchants très vilains ont recouvert son A ! Il aura une meilleure raison d'y retourner après s'être fait braquer. C'est beau l'anarchie. Et puis il y a notre ami Rainer, sorte de dinosaure bloqué en 74 ou en 79, et qui n'écoute que les Clash et les Ramones. Bref, passons.
Il y a dans ce film des scènes vraiment bizarres : mais où veut-il en venir ?! (interrobang) Juste un exemple. Rah j'ai oublié son prénom. Peu importe. La fille distribue ses tracts anti-Vague au pied des portes des salles de classe, et puis tout d'un coup, ce n'est plus que musique angoissante, regard angoissé, lumière qui s'étend, menace alors qu'on sait très bien qu'aucun monstre ne va lui sauter dessus ni aucun psychopathe l'agresser. Elle l'aurait mérité, c'est une fille, alors on l'espère un peu, mais non. Plus sérieusement, sur l'instant (essayez de monter sur l'instant, vous verrez que ce n'est pas si facile que ça en a l'air, mais j'y arrive enfin), je pensais que c'était humoristique, un peu parodique (mais de quoi?), que sais-je? J'en doute un peu maintenant : peut-être le réalisateur voulait-il par là signifier que la Vague étendait partout sa terrrrrrrrible menace et que bien courageux sont les individus qui résistent ? Je n'ose croire plus longtemps à cette hypothèse.
Dans le négatif : tous les passages 'ados'. Les fêtes, le skate, tout çaaaa. Non. Si j'avais eu le caractère d'Ignatius, je me serais plusieurs fois écrié : "Dois-je en croire mes sens ? Suis-je vraiment le témoin d'une perversion aussi totale ?" Très peu pour moi. En compensation, on a par exemple le prof ringard qui assène un "Alea jacta est" ; il n'en faut pas plus pour me faire rire. Et puis Rainer qui fait gronder les pas de sa communauté d'élèves dont certains commencent à s'impatienter : "Il y a un autre objectif à cet exercice. Lequel ? En-dessous c'est la classe de Wieland".
Il y a ce passage où la Vague déferle sur la ville, ce n'est pas forcément raté, mais ça fait terriblement penser à Stress de Justice et là-dessus Die Welle ne soutient pas la comparaison. La Vague déferle trop tôt cela dit : ils font encore figure de plaisantins et c'est logique dans la progression du film. Mais c'est comme ça, il se trouve que d'autres ahuris font rien que de nous embêter en ayant déjà fait des choses comparables à l'aune desquelles on se retrouve jugé.
Ce que j'ai préféré reste quand Rainer est avec sa classe. On peut trouver les élèves caricaturaux, mais je crois que ce sont les ados qui sont eux-mêmes des caricatures dans la réalité. Et puis la fin du film donne un rôle à ce côté cliché. Oui c'est cliché, mais justement, en partant de la classe la plus banale qui soit, on arrive au drame. Si les conditions de départ avaient été exceptionnelles au contraire, la portée du film s'en trouverait amoindrie.
Alors la méthode Rainer ? Attention, Alain Finkielkraut s'arrache les derniers cheveux qu'il lui reste (il est allé voir Entre les murs) en voyant ces scènes d'apocalypse. Il sera rassuré, peut-être, en voyant le malotru désigné longuement à la vindicte populaire. Là encore, tout ne me parait pas clair dans les intentions de l'auteur. Reprenons. Notre prof anar' veut parler d'autocratie, il prend vite conscience de la naïveté de ses élèves persuadés qu'une dictature ne pourrait pas se reproduire en Allemagne. Il décide donc de mettre en pratique son cours et de faire jouer les éléments qui amènent à la dictature. Rainer devient Herr Wenger, on doit se lever pour parler, puis trouver un nom pour la communauté, un uniforme, un emblème, etc. Mais les élèves s'emballent, et l'affaire lui échappe. Tout le long, sa hiérarchie le soutient, les élèves suivent (à deux exceptions près), ils en parlent chez eux et les parents ne réagissent jamais ; seuls quelques profs sans doute jaloux désapprouvent. Quand il comprend être allé trop loin, il a toujours carte blanche de sa hiérarchie et assène une dernière leçon assez magistrale d'ailleurs prouvant par l'exemple que la barbarie n'est jamais très loin. Si le film s'arrête là, les élèves l'adulent, les collègues mangent leur chapeau, les fleurs fleurissent, les oiseaux chantent, c'est le sauveur de l'humanité. Mais il y a un psychopathe parmi les élèves qui sort son flingue, tire sur un élève, et se règle son compte mais sans jamais dire FULL... METAL... JACKET bon je m'égare. Et donc, logiquement, notre Rainer devient la pire des crapules, son compte est bon. Ce n'est pas pour dédouaner Rainer de sa responsabilité, mais simplement pour souligner que c'est un peu facile pour tous les protagonistes, plus passifs les uns que les autres, de le désigner lui comme responsable. Tous ont eu le choix de quitter le cours, une seule l'a fait et l'autre s'en est sentie exclue (égo blessé). Bref, il ne faudrait pas faire l'impasse sur la psychologie humaine en se contentant de désigner un bouc émissaire. Là-dessus, je ne sais pas trop où se place le réalisateur.
Pour finir, il est quand même assez jubilatoire de retrouver, en pleine séance de manipulation collective, le slogan de notre bienaimé Président : Ensemble, tout devient possible.
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