vendredi 2 janvier 2009

Le progrès ne connaît plus de limites


Ah ! Cornegidouille ! De par ma chandelle verte ! Merdre ! J’ai parlé trop vite. Pas reçu le Tome 2 des Chroniques de Vialatte. Je crains ne pouvoir mettre la main dessus de sitôt. Si ce n’est en occasion, et encore. Mais je l’aurai, dussé-je, selon le mot de Don Quichotte, aller jusqu’au fond du ventre de la baleine dans laquelle il est caché !

J’ai du temps pour le trouver, car il m’en faudra encore pour terminer le Tome 1 ; et puis mille folies sont à lire, je ne serai pas pris dans la spirale du néant littéraire, non plus que je ne cèderai aux sirènes des plus sinistres têtes vides de gondoles. Et puis de toute façon, « il est urgent d’attendre ».

Vous parlerais-je en attendant du premier tome ? Oui. C’est que j’en suis à la chronique 81, autant dire que j’ai lu 80 chroniques jusque-là, étalées du 9 décembre 1952 au 22 juin 1954. Et puisque le calcul vous manquera jusqu’à vous empêcher de dormir ; et parce que vous ne savez probablement pas calculer un pourcentage, je le fais : 8,91 % des Chroniques font désormais partie de ma misérable culture. Mais pourquoi, direz-vous, cet ahuri parle-t-il en chiffres de ce qui ne saurait être quantifié ? Pourquoi ne pas en louer la Qualité, ce qui en est inestimable ? Par dérision. Par vialattisme. "Notre époque est friande de chiffres. A juste titre" (quel sens de l'ironie !)

Comment mieux parler de ce livre que tel que je vais le faire ? C’est un pavé aux dimensions extraordinaires à elles-seules, jugez plutôt :13 cm de largeur, 20 cm de longueur, et 3 cm de hauteur, s’il m’est permis de faire confiance à mon double décimètre. N’étant pas fort en calcul mental, je laisse le soin à ma calculatrice de révéler l’impensable : ce livre a un volume de 780 cm3 ! Je ne vous sens pas convaincus ! Que direz-vous alors quand vous saurez que c’est équivalent à 800 g d’eau de mer ! Ahurissant, non ? Prélevez 800 g d'eau de mer dans l'Océan Pacifique (il y a déjà assez de Paix dans le monde), que cela change-t-il ? Rien. Prenez 780 cm3 de Vialatte, que cela change-t-il ? Tout.

Poursuivons. Aussi grandiose que cela puisse paraître, ce livre est blanc. Et il y a un dessin de Chaval sur la couverture. Chaval, qui n’était pas un con, puisqu’il s’est suicidé. Chaval, qui n’a pas eu de chance, puisqu’il a fait ça en janvier 68, quel oiseau (rappelons que pour Chaval, Les oiseaux sont des cons) ! Bref, ce Chaval de trait ne manque pas d’air et il a le chic pour illustrer à point ce livre d’un dessin qui n’est que Bienséance dérisoire, quichottisme de salon, et absurdité ultra-signifiante… vous pouvez le voir dans ma note précédente et ici-même. Et c’est tout dire. Et c’est pour cette raison que je préfère dire autre chose, le contraire même de ce que je voudrais dire. Car c’est en lisant Vialatte qu’on se rend compte qu’il est proprement stupéfiant que le livre que je viens de refermer pour écrire cette note (je n’ose évidemment dire chronique), alors qu’il devrait logiquement s’enfoncer dans le bureau sur lequel je l’ai posé, reste dessus bien sagement, comme si sa maman l’avait parfaitement éduqué dans son enfance. Seulement, que sais-t-on de son enfance ? A-t-il seulement eu une enfance ? Rien ne le prouve. Tout prouve même le contraire. L’ordre, les lois de la physique, la cohérence, voilà bien ce qui est naturel sans quoi aucun anarchiste en mon genre ne serait là pour s’en étonner. Le livre repose sur le bureau, et c’est bien là ce qui est chose la plus terrible et la plus magnifique qui soit.

Il me faut enfin commencer cet article, c’est-à-dire lui donner une fin et, comme je n’ai pas confiance en ce que je viens d’écrire, bien que ce soit à mes yeux le meilleur article que j’aie pu écrire ici, je vais dire ce que sont ces Chroniques. Ce ne sont que choses grandioses et magnifiques, paradoxes qui coulent de source, chinoiseries qui varient avec les peuples, progrès qui fait rage, directeurs de prison qui s’évadent, malades qui meurent guéris, logiques invraisemblables et invraisemblances logiques, lenteur de la vitesse, je vous en passe… C'est le bon sens qui coule dans ses veines cependant que le non-sens coule dans ses artères ; et dans son cœur, ce n'est plus que champ de bataille entre les deux ; et pour le lecteur profusion de sens !

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