vendredi 31 août 2012

Yabon Breivik



Je commence par ce célèbre andante de Mozart, rien de tel pour me détendre - j'en ai quelque peu besoin. Je me sens parfois trop réactif, ou réactionnaire. J'entends et ça me fait réagir, mais nerveusement. Je me sens d'une intolérance extraordinaire, c'est vrai. "Réactionnaire et intolérant", un journaliste du Nouvel Obs' qui passerait par là verrait donc ce blog comme un lieu, un site fasciste d'extrême-droite. C'est qu'à l'Obs', on a la catégorie nuancée. 

Oh ! j'ai trouvé des alliés. Je vais aggraver mon cas : ils sont généralement croyants, que dis-je croyants ? ce serait déjà terrible ! mais intégristes. Je le raconte ici ou là, dernièrement à propos de Léon Bloy et Thelonious Monk. D'ailleurs, j'aime Céline, Nietzsche, je suis les vidéos d'Alain Soral. J'aime aussi Dieudonné, Etienne Chouard, Rousseau et Robespierre. Bingo ! pour notre observateur qui conclura sans frémir au rouge-brun. Mais si c'est un journaliste du Point qui passe, il sanctionnera rouge-brun-vert, en découvrant toutes les bougnouleries qui parsèment ce lieu.

Je voulais parler d'alliés. Ernest Hello, je le rappelle : 
La grande haine des Saints contre le mal est une des magnificences qui au dernier jour raviront les hommes et les anges. Cette grande haine est un des sentiments les plus inintelligibles à l'homme corrompu. Cette grande haine est l'éclair que la pureté fait dans la nuit en brandissant son glaive.
Si l'on me demandait quel chemin prendre pour faire la paix dans les âmes, je répondrais peut-être : le chemin de l'horreur. Ce qui manque le plus ce n'est pas l'amour du bien, c'est l'horreur du mal. L'horreur du mal !
Voilà. Je dois bien l'avouer, ma haine du mal me paraît vraiment démesurée - et tant mieux. L'un des Mal parmi les pires : le Spectacle.

La règle de base est bien celle-ci : tout ce qui passe à la TV est dégénéré. Il faut obligatoirement à un moment donné se faire taper dessus par la médiacratie pour valoir quelque chose, c'est une règle fatale, nécessaire mais non suffisante. 


Je ne connais qu'à peine Richard Millet. Je l'ai entendu avouer son angoisse de "seul blanc dans le métro". Quand j'entends ça, je pense : je n'ai jamais ressenti une telle chose et ne partage pas son conservatisme identitaire, j'y suis même totalement étranger. Mais le bienpensant, lui, crie au racisme et par conséquence : censure, mort médiatique, sociale, etc. M'enfin, ce n'était pas un coup de tonnerre dans la flûte de champagne. Même Lars von Trier (sur Lui la Paix) et sa somptueuse ironie au Festival de Cannes a fait beaucoup mieux.

Seulement voilà, c'est la rentrée. Et la rentrée encore, ce ne serait rien, mais la rentrée littéraire ! Ah ! ça !... c'est du sérieux, du niveau... disons... pas tout à fait les Jeux Olympiques... mais pas loin quand même. En termes d'impact, c'est la même catégorie que le championnat de contrôles anti-dopage annuel du mois de juillet sur les routes de France, peut-être. C'est dire si les journalistes sont sur le pied-de-guerre, prêts à dégainer !

Ce ne seront que prix, auto-congratulations, promotions, marketing, chiffres de vente, plateaux TV, échanges de bons procédés, honnêtes gens, belles personnes, bref, Spectacle. Mettons nos mots à nous : zéro, nul, pitoyable, lamentable, éhonté. 

Mais que serait une rentrée littéraire sans polémique de la rentrée littéraire ? Rien. Donc, polémiquons. Ils sont sûrs de gagner. C'est facile quand tu joues tout seul et que tu fixes les règles : si tu veux gagner tu gagnes. 

Richard Millet publie donc deux pamphlets, Langue fantôme suivi de Éloge littéraire d'Anders Breivik, et De l'antiracisme comme terreur littéraire. C'est parfait ! si parfait qu'on pourrait croire à une opération sous faux-drapeau menée par la médiacratie. Mais Millet a l'air trop honnête. Si ç'avait été Beigbeder, le complot était évident ! prouvé, même.

La polémique étant créée, le malotru malpensant est convoqué au tribunal, c'est-à-dire sur le plateau. C'est i-télé qui sonne la charge. Je crois (mais je peux me tromper, méconnaissant très largement ce petit monde) que c'est le groupe Canal+. L'esprit Canal... quelle pire abjection faussement progressiste et véritablement bienpensante ?


Cet entretien est sidérant. 

Les journalistes ne comprennent rien : 
- pas le titre
- pas les extraits qu'ils lisent
- pas les réponses de Millet

"Vous vous rendez compte que vous êtes en train d'en faire un héros ?" Plaît-il ? 

Ces journalistes se croiraient en droit de faire le procès de Dostoïevski ! Il a raison Millet. Auraient-ils Shakespeare devant eux : "êtes-vous antisémite ?" Rimbaud : "vos fugues et vos poèmes, ce sont des provocations et des coups médiatiques, non ?" 

Millet est quasiment sommé d'avouer qu'il va quitter Gallimard. Et qu'il regrette ses fautes, ses horribles péchés !

"Vous êtes raciste ?" La réponse de Millet est très claire, mais quel médiacrate peut comprendre ça ?

"Vous le regrettez ce titre ?

"Est-ce que vous regrettez l'émotion que ça suscite ?"

"Est-ce que vous êtes un écrivain d'extrême-droite ?"


Millet est-il raciste, d'extrême-droite ? On s'en fout ! Pourquoi ? Parce que nous, lecteurs, sommes capables de quoi ? de discernement. Étonnant, non ? Comment l'élite du peuple, celle qui nous délivre l'Information, qui nous éduque, nous assomme d'experts (experts blabla !), de spécialistes et de représentants, pourrait-elle s'y résoudre ? La populace, il faut lui délivrer la bonne pensée, sinon ce serait quoi ? l'anarchie ?... la révolution ?... le communisme ?... la démocratie ?... Allons allons !

En fin de compte, de quoi s'agit-il ? Moi, ça ne me dérange pas de vivre dans un monde où les autres ne pensent pas, ne ressentent pas comme moi. Athée jusqu'au bout des ongles, j'aime plus que tout côtoyer intellectuellement les grands croyants des diverses religions. De gauche radicale, je ne crois pas que le monde entier puisse le devenir, et ne le pense pas souhaitable. Cosmopolite, je n'ai pas le désir infantile que tous soient cosmopolites. Millet ne l'est pas - et alors ? La seule question qui m'intéresse est : est-il un grand écrivain ? En revanche, j'ai de plus en plus de mal à tolérer (...) les apôtres de la Tolérance qui condamnent tout écart à la bienpensance. Tartufes ! Soyons les plus forts !

samedi 25 août 2012

Ouf, de l'anti-Histoire !

"L'histoire, c'est terrible à faire vous savez.

La phrase est du sieur Henri Guillemin, lui accusé par Régine Pernoud (Jeanne devant les Cauchons) d'avoir fait de l'anti-histoire à propos de Jeanne d'Arc. Pourquoi ? Parce qu'il aurait fait son travail sur Jeanne (Jeanne, dite Jeanne d'Arc et ses conférences télévisées) en seconde main. Querelle d'experts qu'il est bien difficile de juger pour un profane. On peut dire que Guillemin lacère régulièrement Michelet pour avoir travaillé non pas sur les sources mais en deuxième main - conséquence de quoi : erreurs, mensonges, etc. En revanche, Guillemin n'est clairement pas un spécialiste du XVe siècle et il est possible qu'il n'ait pas tout documenté de première main sur ce dossier.

Guillemin balaie d'un revers de main la prétendue objectivité (et la scientificité) de l'histoire. Il est des historiens qui y tiennent, ça fait sérieux. D'autres disent que l'histoire n'est pas une science, il s'agit plus de comprendre, pas d'expliquer. Certains parlent de "connaissance par traces". Furet, François Furet estimait que le fait historique est un choix intellectuel (et il savait de quoi parler, quand il s'agissait de faire de Robespierre le grand-père de Staline, avec son fondation Saint-Simon financée par ? devinez...)
Bref ! bref ! bref ! L'histoire est de toute évidence une construction, dans le choix du sujet, des questions posées, des documents et faits sélectionnés, dans l'écriture - puisqu'il faut bien l'écrire... et certains l'écrivent bien - Michelet. Que certains historiens se démènent pour prouver l'objectivité de leur travail m'a toujours paru insensé. 

Guillemin, en introduction à son récit sur la Commune, cite trois non-historiens :

Faites attention à l'histoire que l'imposture se charge d'écrire. 
Chateaubriand

Croire à l'histoire officielle, c'est croire des criminels sur parole.
Simone Weil

Dites le vrai. Ne racontez pas un opprobre notoire comme on raconterait n'importe quelle histoire.
Victor Hugo

Qui écrit l'histoire ? Les vainqueurs. Le pouvoir. Évidemment ! Et l'histoire n'hésite jamais, d'ailleurs, à dénoncer, en tout cas à démasquer, les "romans nationaux" successifs. Aujourd'hui, on raillera très facilement le discours du Tour de la France par deux enfants, bible de l'enseignement sous la IIIe République. Mais qui pour déconstruire notre propre récit à nous ?

Quel est le pouvoir aujourd'hui ? La >> République << >> démocratique << et maçonnique à en croire Frère Mélenchon, Frère Peillon, ou Frère Bertrand - et ce ne serait peut-être qu'à peine abusif de leur donner raison.

C'est donc sa contre-histoire qu'il faut faire, ou son anti-Histoire. Au diable la majuscule de l'Officielle. Que cette contre-histoire soit vraie ou fausse, c'est insignifiant (elle est fatalement fausse, tout comme l'Histoire). Bornons-nous, bornons notre subjectivité à dire le vrai, c'est-à-dire à ne pas mentir, et ne rien cacher de ce qui pourrait nous déranger. C'est le mot d'ordre du père Guillemin. Dans un autre registre, celui aussi d'Etienne Chouard. Également : de Franck Lepage. Michel Onfray ? Nous qui sommes démocrates, on en a soupé de la >> Démocratie << ; nous qui sommes de gauche, nous en avons soupé du >> centre-gauche <<.

Comment tout cela a-t-il commencé ? Il faut remonter au déboulonnage de l'ennemi : la monarchie absolutiste. 

De Guillemin, on peut écouter sa conférence sur Robespierre et la Révolution Française : 

Il raconte avec un extraordinaire brio la prise de pouvoir des milieux d'affaires aux dépends de l'ancienne aristocratie. Et l'apparition des "honnêtes gens" (La Fayette), c'est-à-dire les "gens de bien", les gens qui ont du bien, les possédants. Les "honnêtes gens" qui comprendront vite la supériorité d'un régime >> démocratique << sur un régime monarchique pour la conservation des intérêts. La Bourgeoisie écrit les lois, et c'est au nom de la volonté générale, de la souveraineté populaire et nationale : c'est magnifique. Et voilà le mythe du suffrage universel prêt à remplacer le mythe royaliste. On est plus que jamais dedans.

Évidemment, dès que le peuple se mêle de ce qui ne le regarde pas, ça ne va plus. 17 juillet 1791 : feu sans sommation sur la foule. 22-28 mai 1871 : la semaine sanglante. Etc. 

Justement sur la Commune, Guillemin (en 13 parties) : La semaine sanglante

Depuis 1789 en somme, la Bourgeoisie fera tout pour éviter le renversement des structures sociales. Et, très important, à chaque fois que la menace rouge était trop forte, un détournement des questions sociales vers du sociétal. Tout est bon : la défense nationale, la laïcité, etc. Encore aujourd'hui, le >> centre-gauche << ne s'attaque pas à la Banque, mais propose le mariage homosexuel - bon, d'accord.

De Guillemin encore, la série sur la préparation de la guerre de 1914 (13 parties aussi) : L'autre avant-guerre

Tant de perles, dans ces conférences, tant de perles ! Par exemple l'Affaire de Panama dans la 5e partie de "L'autre avant-guerre" : 
"ils vendaient, ils vendaient en sachant parfaitement qu'ils vendaient des titres pourris à la clientèle, et c'était surtout une clientèle de petites gens... vous n'imaginez pas les bénéfices qu'ils ont fait". 
Ça ne vous rappelle rien ?

Le même travail, par la lorgnette culturelle, est mené par Franck Lepage. Lui fait la promotion de l'athéisme culturel dans ses conférences gesticulées. Il a arrêté de croire en la Culture, en la >> démocratisation culturelle << comme nouvelle religion de "la gauche". Mais "la gauche", c'est le >> centre-gauche << soit les possédants. 

Il reste à écrire notre Dictionnaire.

mercredi 15 août 2012

Au hasard, Balthazar !

Le Balthazar du Pilat
En croisant par hasard cet asinus hier, je repensai par la même occasion à ce grand film de cinématographe - il tenait au terme - de Robert Bresson. Au hasard, Balthazar : le titre seul évoque mille et une choses. Tout âne s'appelle Balthazar et tant pis pour les autres. Voilà déjà une affaire réglée. "Au hasard, Balthazar", c'est la devise des comtes des Baux. Bah ! ils ont pris ce nom par toponymie : Bale égale escarpement, les Baux de Provence donc sur lesquels ils comptaient bien régner. Il leur fallait toutefois un parrain, un patron, une légende à la hauteur, quelque chose quoi... Bautezar était tout indiqué (Balthazar). Ne manquait plus alors qu'une devise. Un petit calembour, ça ne déplaisait pas au Cavanna de l'époque, mais ça avait en plus une force un peu magique racontent les historiens. Et on vous le dit depuis tout petit : le Moyen-âge était peuplé d'arriérés mentaux superstitieux et enfouis dans les Ténèbres - Voltaire ouakbar ! Croyez-le à la fin ! Je m'égare. 

Leur calembour, donc, sorte de méthode Coué vouée au défi, à l'audace (et on retrouve nos Voltairiens : Danton-de-l'audace-encore-de-l'audace-toujours-de-l'audace) : a l'hasart Bautezar (des spécialistes en vieux provençal confirmeront l'orthographe d'époque). 


Au hasard, Balthazar !

Et vous n'imaginez pas ce que furent les guerres baussenques. Oh ! on n'est pas loin du byzantinisme. Ce ne furent que guerres, mariages et diplomaties. Que les Baux menèrent non sans afficher un certain esprit de résistance, assez jovial si on en croit leur devise, envers les Catalans leurs ennemis. 

Bon, les Baux ont été vaincus, terrassés, liquidés, démantelés. C'est encore plus beau, j'ose le dire. Et c'est assurément à cet esprit-là que Bresson a voulu rendre hommage pour ce film qui va montrer la Douleur du Monde. Le Monde est Douleur, c'est entendu - on peut le parcourir avec enthousiasme et panache, se sacrifier et s'en remettre au hasard - et d'autres diraient à Dieu. 

Question Douleur, il se pose le Bresson. Ce destins croisés Marie - Balthazar (puisque l'âne fricote avec l'âne) ne ménage aucun suspense : on y va tout droit. La chemin est tout tracé. D'une déception l'autre, d'une souffrance à l'autre et le terminus : la mort. Bresson c'est un peu Bernanos au cinéma. On va vers le cœur, et par les chemins les plus boueux qui soient. L'efficacité, la rapidité, la modernité sont balayées comme autant de dévoiements.  C'est cet abruti de jeune sur sa mobylette : "C'est chouette un âne, c'est rapide, moderne."  


D'un âne à une âme, il n'y a qu'un pont. 

Et personne, plus personne pour le franchir.

Comme dans chacun de ses films, le parcours de Marie-Balthazar est un chemin de croix. Vaincus ! Terrassés eux aussi. Moi, ça me rappelle Suarès cette histoire : 
"En avant. […] Puissé-je ne rien garder à mes semelles de tout ce que je quitte, et ne rien emporter que mes belles douleurs, mes belles conquêtes, toutes mes victoires sur moi-même en tant de combats où j’ai été vaincu selon le monde, défait par la laideur et révolté par le bruit. […] En avant !"
Que de laideur et de bruit, en tant de cages, de fouets, de vitesse, de trahisons, de cynisme, de violences !... en fait, ce bruit et cette laideur tendent à être universels. Il y a aussi les démissionnaires. Mais il y a ceux qui s'accomplissent, vont au bout de leur destination. C'est leur destain. Quitte à le vivre, autant le vivre en l'aimant assez pour être capable de vouloir le vivre, le revivre, le revivre éternellement - Zarathoustra défends-moi ! Au hasard des souffrances et des désillusions, on les retrouve - qui ? mais Marie ! mais Balthazar ! Les Saints !

A vrai dire, on ne sait pas de quoi souffrent tous ces protagonistes. Bresson s'en fout. Et nous aussi. Ils souffrent. Conséquence de quoi ? voir le film. Nous, nous ressentons, avant d'essayer de comprendre. Je crois que ça aurait fait plaisir au cinéaste. Pendant que "les années passent", il ne filme que les pattes de Balthazar - parce qu'évidemment ça pourrait être n'importe qui ou n'importe quoi. Les pierres elles-mêmes doivent souffrir. 


Bresson est bernanosien c'est entendu. Mais je n'ai jamais vu des références à Léon Bloy - mon inculture en est sans doute la cause. Mais ce film est bloyen. La Femme pauvre, bien entendu, qui se termine par cette invraisemblable phrase : 
"Il n'y a qu'une tristesse, c'est de n'être pas des SAINTS."

Alors voilà, Marie, dans ce monde de Tartufes modernes et cyniques sans valeurs, est une Sainte qui sacrifie aux cérémonies de son Amour. Balthazar, "rétrograde et ridicule", est un Saint. Leur sort est fatalement tragique dans un monde où "le billet de banque et le culot, l'aplomb suffisent" (le vieux Grigou). 

Mais, Marie ni Balthazar ne sont tristes. Ils affrontent la Douleur. Le grand Louis Armstrong les comprendrait :


samedi 11 août 2012

Thelonious Monk et Léon Bloy : l'intégrisme sinon rien

Depuis l'Affaire Siné, et un tract particulièrement percutant, je suis tombé dans la marmite nabienne. Son passage à Apostrophes en 1985, un délice ! "On entre dans un auteur comme dans une cathédrale !" Ah ! Ses livres, du coup... sa guerre déclarée, à coups de coups d'épée dans l'eau kamikazes contre le "juste milieu", ce "bon Dieu des imbéciles"... Ce refus total - Absolu - des compromissions. Cet intégrisme en fait, a été une vraie bouffée d'air pur, complètement anachronique dans cette époque de sentimentalisme dégénéré. C'est vrai quoi, Annie Lemoine elle a un public à qui elle donne des émotions, on ne peut critiquer ses livres, c'est insultant. Groumpf !

Or, donc, Marc-Edouard Nabe. Et Nabe existe en tant que Nabe, mais Nabe existe en tant que passeur vers les Anciens Intégristes. Nabe c'est la drogue et le dealer réunis. C'est lui qui m'a montré qu'il y avait au-dessus du rock que je ne supportais plus, le : Jazz ! Il me suffit d'écouter... au hasard... C Jam Blues par l'Oscar Peterson Trio, pour saisir de quoi je lui suis redevable. C'est lui, aussi, qui m'a montré qu'il y avait au-dessus de guignols post-modernes à la Beigbeder que je ne tolérais plus, la : Littérature ! La Joie de la lecture de Mort à crédit de Louis-ferdinand Céline pour en témoigner.

Il a réédité son premier et fracassant livre : Au régal des vermines. Je le lis, chapitre par chapitre. J'en isole deux pour cet article. L'un sur Monk, l'autre sur Bloy. Ce sont les mêmes. Monk, Thelonious Monk. Il y a des noms qui sont tout un programme. C'est comme Pier-Paolo Pasolini, ou Louis-Ferdinand Céline. Leur nom suffit. Contre-exemple : le comte Maurice Irisson d'Hérisson - invraisemblable nom d'un des funestes "honnêtes gens" du XIXe. 

Mais revenons à Thelonious Monk. Lui qui, raconte Nabe, "est allé se coucher pour des années, après avoir quitté le domicile conjugal sous prétexte que ses enfants y avaient introduit à son insu un disque des Beatles." Il s'est refermé progressivement au monde, jusqu'à en mourir. Ça c'est de l'intégrisme, ou je ne m'y connais pas. Mon respect en est forcé. "La liberté ou la mort !" - il faut encore en être capable et qui aujourd'hui ? Monk et les Beatles ne peuvent pas coexister. Oh, ça ne dérangeait assurément pas les seconds. Et pour cause. Donc, "Monk est mort. Monk est mort. Il faut bien se mettre ça dans la tête."


Et Léon Bloy ? Même rengaine ! Absolument intégriste. Le seul catholique de tous les temps. Aucun de ses "coreligionnaires" ne peut le supporter. Tous par lui démasqués dans leur tartuferie hypocrite. De même, quel "athée" pourrait-il accepter tout Nietzsche ? Voilà ce qu'en dit Nabe : "Je suis comme ça moi, je ne tolère que les hystériques, les fanatiques impitoyables. Si vous êtes prisonnier, soyez Sade ! A être fasciste, autant être Rebatet ou rien ! Si vous êtes catholique, soyez Dieu, pas moins..." On peut rajouter dans la même veine qu'il est éclatant que Céline a voulu et sans doute réussi à être le plus grand antisémite de tous les temps. C'est la demi-mesure, qui est insupportable. C'est trop demandé d'avoir une âme, d'être animé ? Tolérance interdite ! Intolérance sans frontière, voilà le point !

Chaque note de Monk, chaque mot de Bloy, balayent les milliers d'insignifiances qui, pour se protéger, propagandent pour la "tolérance" - tolérance qui va jusqu'à faire mourir Monk, ou les enfants de Bloy, mais tolérance vous comprenez... C'est Nietzsche qui a bien parlé de ça, comme de tout le reste : il explique que l'humilité est érigée en vertu par le ver de terre voyant le pied qui va l'écraser. Monk ou Bloy n'ont besoin d'aucune tolérance. Ils sont là, en 2012.

Léon Bloy s'en prenait à ces lieux communs : 

Etre poète à ses heures
Je vous mets au défi de trouver un Bourgeois qui ne soit pas poète à ses heures. Ils le sont tous, sans exception. Le Bourgeois qui ne serait pas poète à ses heures serait indigne de la confrérie et devrait être renvoyé ignominieusement aux artistes, à ces espèces d'esclaves qui sont poètes aux heures des autres.
Par exemple, il est un peu difficile de comprendre et d'expliquer ce que peut bien être cette poésie aux heures du Bourgeois. Supposer un instant que cet huissier se repose des fatigues de son ministères en taquinant la muse, exécutant des cantates ou des élégies, serait évidemment se moquer de ce qui mérite le respect. Ce serait, si j'ose le dire, une idée basse.
Le Bourgeois n'est pas un imbécile, ni un voyou, et on sait que les vrais poètes, ceux qui ne sont que cela et qui le sont à toutes les heures, doivent être qualifiés ainsi. Lui est poète en la manière qui convient à un homme sérieux, c'est-à-dire quand il lui plaît, comme il lui plaît et sans y tenir le moins du monde. il n'a même pas besoin d'y toucher. Il y a des domestiques pour ça. Inutile de lire, ni d'avoir lu, ni seulement d'être informé de quoi que ce soit. il suffit à cet homme de s'exhaler. L'immensité de son âme fait craquer l'azur.
Mais il y a des heures pour ça, des heures qui sont les siennes, celle de sa digestion, entre autres. Quand sonne l'heure des affaires, qui est l'heure grave, les couillonnades sont immédiatement congédiées.
"Être poète à ses heures, rien qu'à ses heures, voilà le secret de la grandeur des nations", me disait, dans mon enfance, un bourgeois de la grande époque.

Une bonne moyenne
Le président Jules Grévy venait d'inaugurer le Salon des Champs-Élysées. Il dit à ceux qui le reconduisaient à la sortie : "C'est cela, messieurs, c'est cela. Pas de génie, mais une bonne moyenne, voilà ce qu'il faut à notre démocratie !"

Exégèse des lieux communs, à lire d'urgence. Et ensuite, son Journal, bien entendu !


Allez, du Monk pour finir :







vendredi 10 août 2012

Passage dans les Ecrins : bonus

La Meije, ah bin oui...

Le GR54, Tour de l'Oisans, continuait par là, après le Col d'Arsine...

Quelques progrès au sténopé

Mais bon... Ah, si quand même