mercredi 23 avril 2008

Retention de sûreté, encore

Voici un film de T. Lacoste pour le site l'autre campagne qui traite de ce sujet.

" Avec Jean Bérard, historien, Université de Paris VIII, membre de l'Observatoire international des prisons (OIP) ; Jean-Pierre Boucher, juge de l'application des peines au Tribunal de Grande Instance de La Rochelle et ancien président du Syndicat de la magistrature ; Christian Charrière-Bournazel, avocat et bâtonnier de Paris ; Sophie Desbruyères, conseillère d'insertion et de probation (CIP), secrétaire nationale du syndicat national de l'ensemble des personnels de l'administration pénitentiaires (Snepap-FSU) ; Claude-Olivier Doron, philosophe, AMN Paris VII (REHSEIS) et secrétaire éditorial des Cahiers du Centre Canguilhem ; Véronique Mao, surveillante pénitentiaire, secrétaire nationale de l’Union générale des syndicats pénitentiaires (UGSP-CGT) ; Emmanuelle Perreux, juge de l'application des peines au Tribunal de Grande Instance de Périgueux et présidente du Syndicat de la magistrature et Daniel Zagury, psychiatre, chef de service au Centre psychiatrique du Bois-de-Bondy, expert auprès de la Cour d'appel de Paris."

vendredi 11 avril 2008

Un aperçu de culture-monde

Il y a de cela un an, j’assistai à un concert d’Interzone (Serge Teyssot-Gay & Khaled Al Jaramani) avec Antiquarks en première partie. Ce fut comme le révélateur des tensions que je connaissais entre idéal de sagesse autarcique d’une part, traversée des frontières et altruisme d’autre part. Comme la découverte qu’il était, pratiquement, possible – car, idéalement, je le savais depuis « toujours » et d’autant plus après avoir lu Edgar Morin, Jean-Pierre Vernant, Spinoza, etc. – de se construire une identité sans marcher sur les autres. Réciter encore la phrase-programme : « Pour être soi, il faut se projeter vers ce qui est étranger, se prolonger dans et par lui. Demeurer enclos dans son identité, c'est se perdre et cesser d'être. On se connaît, on se construit par le contact, l'échange, le commerce avec l'autre. Entre les rives du même et de l'autre, l'homme est un pont. » (J.-P. Vernant, La traversée des frontières).

Loin d’une quête d’exotisme pour l’exotisme ou d’une sorte de tourisme culturel sans quitter sa ville, loin aussi des écueils du relativisme absolu ou de l’universalisme abstrait, c’est au contraire multiplier les points de vue (et « le point de vue fait l’objet » disait Bachelard) sur l’unitas multiplex – le complexe, un et multiple – que je veux mieux connaître et comprendre. C’est dans cet optique que j’ai alors tenté de franchir le pont qui me séparait de cultures autres. C’était franchir le Rubicon, cela s’est avéré pour le moins enrichissant. En effet, alors que Noir Désir est en stand by, tout ou presque de ce dont l’industrie musicale nous abreuve par ici me semble fade, déjà entendu, tournant en rond. Il y en a bien sûr pour rester au-dessus des lignes de flottaison : Björk, The Dandy Warhols, Dead can dance, Brian Jonestown Massacre, PJ Harvey, Emilie Simon ou Godspeed you black emperor ont leur univers, leur originalité, leur individualité. Trop épisodique, à moins que ce ne soit ma hantise de la fermeture et de l’égoïsme de nos sociétés qui biaise mon jugement. Peu importe, car en marchant sur le pont, j’ai découvert plus d’artistes enthousiasmants pour eux-mêmes que je n’aurais pu l’imaginer. D’eux, il sera question ci-dessous, dans ce qui apparaîtra malheureusement comme un catalogue, mais il n’y a qu’à écouter, se faire une idée par soi-même, et éventuellement découvrir plus amplement certains d’entre eux.

Quelques liens, avant tout :

Alter Musica : radio de musiques du monde

Voilà, et maintenant, ce que j'ai particulièrement aimé dans ce que j'ai découvert. Mention spéciale, peut-être, au duo Ali Farka Touré / Toumani Diabaté ; à Ravi Shankar et son sitar ; mais aussi au doudouk arménien (Minassian, Gasparyan), au chant polyphonique mongol (Egschiglen) ; aux inévitables du Buena Vista Social Club (voir le film de Wenders) ; à la beauté des chansons de Geoffrey Oryema ; et enfin, aux chants soufis (Faiz Ali Faiz, Nusrat Fateh Ali Khan) dont la force spirituelle sait se faire ressentir. Enjoy... Rendons grâce, également, à Ry Cooder ou Peter Gabriel qui contribuent parmi d'autres à faire connaitre ces artistes du monde entier.


Ravi et Anoushka Shankar

jeudi 10 avril 2008

La République, sa symbolique, son idéologie


On aura remarqué, ou non, que le modèle républicain et laïque est en crise : c'est, selon les points de vue, du fait de la mondialisation, du multiculturalisme à l'anglo-saxonne, de l'Islam, des néo-républicains eux-mêmes, etc. République laïque s'il en est, elle n'est pourtant pas si éloignée que cela de l'ennemi juré : la "religion civile". Or, sous l'impulsion de Sarkozy (c'est un thème récurrent chez lui, on le retrouve à Latran et à Riyad depuis qu'il a été élu), le modèle risque d'évoluer dans un sens pas vraiment souhaitable. Le problème, c'est qu'évolution il doit y avoir, non pas immobilisme dans l'illusion que la République laïque serait pure, parfaite, éternelle et universelle. Voilà donc, pour mieux comprendre ce qu'est la République laïque, quelques résumés d'ouvrages importants... Puissent-ils servir de base à une réflexion innovante sur laïcité, République et démocratie au XXIe siècle...





PS : je sais, la photo n'a rien à voir, mais c'est pas grave, elle est jolie Norah Jones, et puis il n'y a qu'à écouter sa musique, ça fera passer la lecture plus vite

lundi 7 avril 2008

F. Lang actualisé - part III : La Zona


Il y avait eu La question humaine (N. Klotz) puis Telepolis (E. Sapir) ces derniers mois et j'ai déjà eu l'occasion de les rapprocher par leur dette envers Fritz Lang et ses films de l'entre-deux-guerres notamment. C'est désormais La Zona, premier film prometteur du Mexicain Rodrigo Pla qui s'y colle. En effet, comme dans Metropolis, la ville est coupée en deux et il y a cette idée du médiateur entre les deux parties ; et comme dans M le maudit, une chasse à l'homme impitoyable est menée, à l'intérieur de la Zona.



A ma connaissance, ce film est le premier qui traite de ces gated communities, ces communautés fermées, gardées et surveillées, ghettos de riches qui réinventent la division sociale de l'espace urbain jusqu'à le pousser parfois à la limite du séparatisme. Le phénomène touche l'Amérique latine, la Russie, mais pas seulement et risque de s'étendre comme aboutissement des paradoxes du développement des villes globales que pointait déjà Saskia Sassen en 1991. C'est dire que le cauchemar de La Zona risque de se poser de plus en plus fortement, le temps passant.



La Zona raconte comment un accident ouvre une brèche dans le mur entourant la Zona dans laquelle se faufilent 3 jeunes outsiders qui espèrent pouvoir voler quelques objets précieux : l'affaire tourne mal, 2 d'entre eux sont rapidement tués, et le 3ème parvient à se cacher, pour n'être que mieux pris au piège de la chasse qui lui est menée dans une folie paranoïaque et sécuritariste allant crescendo. On pourrait regretter que le réalisateur n'utilise qu'avec parcimonie le regard issu des omniprésentes caméras de surveillance, qu'il nous plonge davantage dans l'aliénation totalisante, mais à quoi bon tant cela a été traité en long et en large au cinéma ou plus encore dans les romans sur la question. En fait, le propos n'est pas tant porté sur le Surmoi de la société que sur la dialectique entre son Moi et son Ça. En clair : ce qui travaille la société et ses individus, consciemment ou pas, et qui la (les) pousse à sacrifier la liberté sur l'autel de la sécurité. Pour cela, des jeux de miroirs, de contrastes, de contradictions sont le réel cœur du film, comme lors de cette fantastique visite du parcours de golf de la Zona où le premier plan n'a pas le moindre intérêt si l'on ne remarque pas l'arrière-plan qui fait toute la richesse du propos.



Le tableau est certes bien sombre, mais l'est-il exagérément ? Non, et c'est là le drame que pose ce film. Mais à l'absurdité de cette organisation sociale de l'espace urbain créant un nouveau genre d'enfermés dehors, au cynisme sans limite de cette communauté de riches, en bref à tout ce que dénonce violemment R. Pla, est opposé - et c'est là encore une filiation langienne - cette obsession de la lutte contre la fatalité (ici, ce rôle est rempli par quelques personnages, à l'intérieur ou non de la Zona ; mais aussi par les jeux de contrastes qui émaillent le film). Il n'y a rien de naturel ou d'inéluctable à ce que les choses se passent ainsi et il appartient aux individus de se révolter contre l'état de fait qu'ils rencontrent, aussi difficile que cela soit - et cela le sera pour tous nos réfractaires. Si l'on extrapole quelque peu, on pourrait penser que R. Pla considère que c'est à la nouvelle génération de mener cette révolte, que la précédente n'en a plus les moyens. Aux jeunes d'affirmer leurs valeurs, la culture-monde, le web 2.0, que sais-je? pour une régénération démocratique et une réinvention des liens de solidarité puisque les anciens sont mis à mal par l'évolution du monde globalisé ?