lundi 26 novembre 2012

Cherche Front de gauche désespérement

Soyons naïfs - c'est ce qui nous est demandé - Mélenchon parle de "Front de gauche", et supposons donc qu'il est vraiment de gauche.

Par les temps qui courent, le peuple de gauche pourrait se réjouir. La déconfiture de l'UMP dépasse toutes les espérances. Même Simone Weil, "pas la grosse dame qui préside..." non la philosophe de gauche, dans l'arsenal qu'elle a mis sur pied pour tailler en pièces la notion de parti politique, n'aurait pu prévoir une telle Bérézina - de quoi se fendre la poire, et les poires doyennes sont vraiment excellentes en cette saison. 

Hélas ! mille et une fois hélas ! à peine avons-nous fini de railler la droite que nous sommes bien contraints de contempler le gouffre qui nous empêcher de rallier la gauche. 

Je veux dire : la gauche. Je ne parle pas du PS... autant passer son temps à démontrer qu'un chat est une souris. Non, le Front de gauche, présenté comme la gauche de la gauche, ou l'extrême-gauche... même retraduit, ça donne : la gauche de l'extrême-droite, ce qui laisse une infime chance de se retrouver quelque part à gauche. D'ailleurs, souvenez-vous : le bruit et la fureur, AAA les andouillettes chez Moody's, le capitaine de pédalo, Chavez, que se vayan todos (le Siècle et le Fouquets)... 

Pourquoi le Front de gauche ? Parce que Mélenchon a voté Maastricht, et a ensuite compris son erreur. Il a entrepris de rétro-pédaler au sein du PS puis en dehors, en analysant à la fois le mauvais chemin de la construction européenne, et la forfaiture démocratique qui l'impose contre la volonté des peuples. 

Il se trouve que nous pensons qu'il faut encore tirer le fil pour remonter plus loin, que ces hautes-trahisons oligarchiques sont contenues dans nos anti-constitutions antidémocratiques. Depuis le travail d'Etienne Chouard, nous essayons de remettre les mots à l'endroit, puisque tout le monde avant 1789 opposait strictement la démocratie (quasiment assimilée par tous les penseurs politiques à l'anarchie et à la menace de la populace) au gouvernement représentatif. L'une était le contraire de l'autre. Le tour de passe-passe est formidable : les honnêtes gens ont fait le gouvernement représentatif et l'ont appelé de son contraire - la démocratie. Depuis, nous l'avons gobé. C'est pourquoi nous nous plaçons en faux : c'est au peuple d'écrire sa constitution. C'est dépasser Mélenchon par la gauche. 

On pourrait toutefois s'attendre à ce qu'une discussion soit possible. Même des personnalités de droite comme François Asselineau et Nicolas Dupont-Aignan acceptent la discussion sur les institutions et la rénovation démocratique, sans pour autant partager nos conclusions sur le tirage au sort par exemple. 

Mais le Front de gauche, lui, ne veut pas de discussion. Alors que Utopia et le Front de gauche avaient invité Etienne Chouard pour parler de ces questions, ils se sont finalement aperçu - mais de quoi au juste ? Vous savez bien... c'est la bête immonde... les heures les plus sombres de notre histoire... l'extrême-droite... le fasciiiisme... Etienne Chouard relaie des sites à la dangerosité très dangereuse, et sans même avertir en bandeau qu'il faut manger 5 fruits et légumes par jour, pour votre santé. Imaginez un peu la scène : vous êtes un honnête gauchiste un peu radical, vous vous interrogez après avoir entendu le sieur Mélenchon parler du club le Siècle, et vous vous renseignez sur les institutions et les trahisons démocratiques, vous tombez sur le site d'Etienne Chouard et jusque-là tout va presque bien, mais bientôt c'est le grand tourniquet, vous risquez d'atterrir chez... mais Alain Soral... mais Thierry Meyssan... mais Jacques Cheminade... oui c'est aussi horrible que cela ! et bientôt ce sera Dieudonné, mi-nègre mi-Hitler vous savez... 

Résumons-nous : parce que le Front de gauche ne nous juge pas assez adultes pour avoir du discernement sur ce que nous lisons, il s'offusque qu'Etienne Chouard invite à des lectures pluralistes, faisant lui le pari de la maturité de son public ; conséquence de quoi, le Front de gauche ne peut pas cautionner une discussion avec Etienne Chouard. 

C'est pure folie.

Cet anti-fascisme sans fascisme prend des proportions de plus en plus ridicules et grotesques. 

Et ça peut continuer demain si le bouffon est envoyé en prison. 

Jean Baudrillard est mort, qui expliquait que c'était un immense honneur fait à l'extrême-droite de considérer d'extrême-droite tout propos hétérodoxe. Voilà le résultat. La gauche n'existe plus. C'était peut-être la condition préalable au redressement.

mardi 13 novembre 2012

Un nénuphar sinon rien



J'apprends ce jour la dégringolade du mot nénuphar, défait de son ph pour se voir affublé d'un f pas à la hauteur. Ma réaction de réactionnaire est d'une part de ne pas comprendre ces tentatives réformatrices pour "simplifier", argument le plus insensé qui soit. Et nénufar... c'est moche. 

Mais au fait, pourquoi ce ph ? Parce qu'on écrivait nénufar jusqu'au XIXe siècle... d'après l'Académie Française, mais je vous rappelle que cette même Académie est celle coupable de cette phrase extraordinaire :
La bonne orthographe distingue les gens de Lettres d'avec les Ignorants et les simples femmes.

Si on en croit plutôt le Trésor Informatisé de la Langue Française, c'est à n'y rien comprendre. On écrivait nenuphar, neuenufar, neufar, ou encore nenufar, d'un mot emprunté au latin médiéval... nenuphar, lui-même dérivé de mots arabes issus du persan nilufar d'après le sanskrit nilotpala, ce qui est élémentaire puisque nilah signifie "bleu-noir" et utpalam "fleur de lotus". nilotpala veut donc dire "lotus bleu". On se demande à ce stade que vient faire Tintin dans l'histoire.

Résumons-nous : on est passé d'un f en persan, parce que sans faire de négationnisme anti-sanskrit, je vois mal l'influence de nilah-utpalam dans l'orthographe f/ph qui nous concerne, d'un f en persan, disais-je, à un ph en latin, puis un f en vieux françois, à un ph en français moderne, et désormais à un f en français "modernisé-simplifié-dégénéré".

D'autres en auraient perdu leur latin. Mais pourquoi les dix-neuviémistes ont-ils jugé opportun de rendre au mot son ph ? Mais par souci naturaliste, pardi ! Le nénuphar est une plante de la famille des nymphéacées : le tout a donné son ph a la partie.

Si vous vous croyez sortis d'affaire, vous allez déchanter. D'où vient nymphéacée ? Tenez-vous bien : "emprunté au latin nymphea "nénuphar"" qui lui vient du grec pour dire "divinité", "jeune fille ou jeune femme" ou d'autres diableries extravagantes.

Conclusion : un nénuphar, c'est joli. C'est pourquoi j'arbitre ce duel gréco-perse en faveur des premiers. Mahmoud me pardonnera.


samedi 10 novembre 2012

Danger ! Toxique ! Littérature.

Voyage au bout de la nuit est un livre très dangereux et très toxique. Frédérique Leichter-Flack veut bien qu'on le lise, mais avec un pharmacien sur son épaule. Le populo passera désormais son permis littéraire en lecture accompagnée.

On fera exception pour l'ado, qui est un abruti qui ne comprend rien - pas même la haine, et qui pourra donc lire le livre. La haine : il n'y a que ça dans le Voyage, chef-d’œuvre, d'accord, mais toxique.

Mme de Stael à propos de Robespierre : "ses traits étaient ignobles, ses veines étaient d'une couleur  verdâtre, il professait sur l'inégalité des rangs et des fortunes les idées les plus absurdes".

Frédérique s'offusque que Céline fustige les guerres même révolutionnaires. Michelet : le volcan révolutionnaire jetait ses étincelles sur le monde entier, l'océan révolutionnaire qui déborde, bla, bla, et reblabla. En effet, nous n'admettons pas ces guerres girondines menées pour razzia ainsi que pour tranquillité intérieure - cf. Henri Guillemin.

Céline n'aime pas les Lumières. Pardi ! Voltaire : "Un pays bien organisé est celui où le petit nombre fait travailler le grand nombre, est nourri par lui, et le gouverne." Votre >> démocratie << est strictement et dans ses fondements, une oligarchie. Nous ne l'aimons pas.

Il n'aime pas la culture. Avec un grand Q - cf. Franck Lepage. Nous non plus.

Il n'aime pas la démocratie. Nous non plus - cf. Etienne Chouard.

En effet, le Voyage est toxique pour les honnêtes gens, plus encore peut-être que Bagatelles pour un massacre.

Guillemin parle de Rousseau, ça vaut pour Céline, et pour tous les pestiférés :

""Vivant ou mort, il les inquiètera toujours." Qui ça, "les" ? Bah ! les sages quoi, les raisonnables, les avisés, les gens de bien, les honnêtes gens..."

"Vous avez entendu ces trois textes, il est évident qu'il y a un ton populaire, un ton peuple, c'est pourquoi Monsieur Ferdinand Brunetière, le grand critique de la Revue des deux mondes, quand il avait parlé de Jean-Jacques, avait dit : "c'est un homme qui par ses origines est peuple, peuple au sens le plus fâcheux du mot". Vous avez compris, c'est un infréquentable, enfin quelqu'un qui n'est pas admissible parmi les gens de bien."


Et une petite citation de Céline : 
"Le vrai rideau de fer, c'est entre les riches et les miteux. Les questions d'idées sont vétilles entre fortunes égales. L’opulent nazi et l'administrateur de Suez, ils parcourent les mêmes golfs, ils ouvrent la chasse ensemble, ils soupent à Saint Moritz. Mais nous là, hâves, penailleux, trimards, mégotiers, revendicateurs, allez... à la niche."