mardi 5 juillet 2011

Hiromi The Trio Project - Jazz à Vienne

Ce soir c'est mon troisième concert d'Ahmad Jamal. Mais la vedette a été volée par l'hôtesse qui lui a apporté des fleurs en fin de concert : Hiromi Uehara. C'est une jeune pianiste que je ne connaissais pas, mais qui a fait sensation à Vienne, ce soir. Disciple de Jamal, elle annonce rapidement être très fière, et l'émotion se lit sur son visage, de lui ouvrir la soirée. Elle s'en montre tout à fait digne, durant toute sa prestation, et lors de la clôture, donc, alors qu'elle traverse la scène pour offrir à son Maître des fleurs comme une petite fille irait demander un autographe. Noble attitude que la sienne : elle reconnaît et respecte les Grands Anciens, ceux qui ont disparu, du moins s'en plaignait Marc-Edouard Nabe dans L'homme qui arrêta d'écrire. Il y a des Grands Anciens à épater, et c'est ce qu'elle entreprend, et c'est ce qu'elle réussit. Elle a un Père, Ahmad Jamal, et un Grand-Père, Beethoven. Sacrée famille, me direz-vous. Mais elle s'en montre à la hauteur.

Sa prestation restera gravée dans beaucoup de mémoires. Quelle sautille-trépigne devant son piano, qu'elle frappe les notes à coups de poing, de coude, de marteau-piqueur (elle n'avait pas de marteau-piqueur ? comment a-t-elle fait ?), qu'elle triture son clavier rouge dégénéré (même couleur que ses diaboliques chaussures) avec un sens de l'humour parfaitement étranger à la dérision régnante à notre époque, elle s'en tire toujours bien. Attention, la voici qui joue Tom et Jerry... le caméraman se laisse entraîner dans un trou de souris pour la filmer et percute le micro. Achtung ! elle joue une mélodie menaçante, et elle se retourne pour voir le loup qu'elle joue s'avançant - c'est peine perdue, elle l'a déjà apprivoisé. Quand elle change de registre, c'est dans la continuité. Quand elle effleure le piano, c'est violemment. Jamais on n'anticipe la direction, elle est toujours dans la bonne. Une boussole aléatoire, mais tous ses chemins mènent au Nord. 

Alors, quand la pathétique, que dis-je ?! quand La Pathétique retentit, celle de Ludwig van bien entendu, je n'en crois pas mes oreilles. Mais à quoi s'attaque-t-elle ? Elle la jazzifie et c'est un enchantement. Bah ! c'est incroyable. 

Elle envoie alors un morceau, seule au piano, époustouflant, et c'est la première ovation debout. Pas la dernière, puisque l'auditoire antique la fera revenir une fois, hélas ! pas deux...

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