dimanche 21 septembre 2014

La dissidence danse

Trois, quatre!

Etienne Chouard est passé chez Taddéi, il y a deux semaines. 4 minutes durant, il a pu faire passer son message, avant d'être assailli par Attali et sa panoplie magique de stratagèmes issus de L'Art d'avoir toujours raison de Schopenhauer. Ritournelle connue.



François Asselineau est passé chez Ruquier, hier soir. 40 minutes durant, il a du faire face aux aboiements des deux chiens de garde Caron et Salamé. Il s'en est plutôt pas mal sorti, médusant notamment un Caron avec les articles 4 et 5 de la Constitution ; et stupéfiant le duo au sujet de l'Etat Islamique financé par l'Occident.



Ces deux passages médiatiques posent la question de la dissidence et de sa stratégie. La dissidence? 

Regroupons-nous : ce sont tous ceux et toutes celles qui veulent sortir de l'euro, de l'UE, de l'OTAN. Une telle rupture avec le système économique et politique justifie le terme "dissidence". Pourtant, Salamé a raison, nous sommes certainement un bon 30% de la population.

Divisons-nous : que de clochers! c'est l'armée mexicaine... les communistes du PRCF, les identitaires de chez Ayoub, les partisans du tirage au sort, des monarchistes, les soraliens, les dieudonnistes, les anciens d'ATTAC avec Nikonoff, les positivistes de Cheminade, etc.

Irréconciliables et parfaitement antagonistes. Si parler de la dissidence est possible, c'est uniquement au regard de l'objectif premier de sortie de l'UE et de l'OTAN. Certains espèrent une mise entre parenthèse des divergences secondaires le temps d'écrire cette première page. C'est grosso modo la ligne de l'UPR, mais, plus encore, celle du rêve de Sylvain Baron.

Prendre le pouvoir est-il possible? Je ne le crois pas. Ou alors, qu'on me montre une révolution ayant fonctionné, ou une argumentation pertinente démontrant qu'elle serait possible. En 1789, les banquiers ont distribué les fusils à la petite plèbe pour chasser la vieille aristocratie du pouvoir et y placer la bourgeoisie. Le peuple a été manipulé puis domestiqué, et s'est formé le fameux "centre-gauche", c'est-à-dire la défense des grands intérêts costumée en Parti Républicain. Nous n'en sommes pas sortis. Henri Guillemin résume la situation 1789-2014 en quelques minutes :


La mafia UMPS décortiquée dès 1970 par Henri... par olivier-frisky

Toujours est-il que nous pouvons défendre nos idées. Comment s'y prendre? Nous connaissons les embûches et les peaux de banane déposées par le Pouvoir. Les stratégies divergent pour les éviter.

Face au déferlement d'anathèmes et au Grand Moulinet de la culpabilité par association, je pense que la ligne défendue par un Jean Bricmont ou un Etienne Chouard est la plus pertinente. Nous n'avons pas à nous défendre d'accusations grotesques. Asselineau est accusé d'être allé discuter chez Serge Ayoub... où est le problème? Chouard est accusé d'avoir relayé du Soral... où est le problème? En quoi ces deux faits nous imposent-ils de nous justifier de ne pas être antisémite? Ça n'a strictement aucun sens.

Il me semble essentiel de ne pas entrer dans le jeu de la justification ("si c'était à refaire, je le referais pas", "nous ne sommes pas antisémites", "je suis allé aussi au PRCF"). D'une part parce que ce ne sera jamais assez rampant pour nos chiens de garde. D'autre part parce que c'est le Verrou à faire sauter, cette politique transparente au point d'être dénudée de l'antiracisme, chevauchée par la gauche depuis qu'elle ne peut plus parler du fond et de transformation de la société. Il leur reste la moraline, et dans ce cadre, toute oreille qui dépasse est à ramener d'une façon ou d'une autre aux "heures les plus sombres de notre histoire". D'où le déferlement de Salamé et Caron à l'encontre d'Asselineau : extrême-droite, gourou, Soral, Ayoub, antisémitisme, "regrettez-vous? regrettez-vous?" , antiaméricanisme primaire, nationaliste (oh mon Dieu!), etc. D'où le matraquage d'Attali et des antifas contre Etienne Chouard.

C'est à mon avis d'autant plus important de tenir bon que le temps nous donne raison. On voit maintenant Valls et Marine le Pen la main dans la main (avec Salamé et Caron pour les soutenir) pour justifier le "déluge de feu" sur les peuples arabes au prétexte que parmi eux il y a d'affreux zozos (formés, financés et armés par l'Occident). Nous sommes intouchables sur la question du fascisme/racisme/etc. Ce sont eux, les chiens de garde, qui ont un problème avec ça. Donc : nous ne devons pas accepter d'entrer dans leur petit jeu de justification, mais établir et démontrer leur imposture.

Je conçois que cette entreprise entre en collision avec la volonté de convaincre le plus grand nombre de spectateurs. Le discours à tenir paraîtra moins consensuel et plus "sulfureux" à court terme. Mais je crois qu'au bout du chemin, ceux qui tiennent la ligne sont reconnus comme tels.

Ils nous accusent, toutes dents dehors, d'inciter à la Haine. Comme le disait Rûmî, ils ont de leur miroir enlevé la poussière. Au contraire, nous avons pour nous l'humour, l'esprit critique, et l'ouverture d'esprit, mais aussi le sang-froid et la sérénité.

Au temps jadis, on poursuivait, traquait, persécutait les hérétiques, les sorcières. D'après nos amis voltairiens laïques et démocrates, cet obscurantisme inquisitorial était très vilain. Cela ne les empêche nullement aujourd'hui, d'avoir pris la place des anciens curés, et de traquer la bête immonde un peu partout, et surtout là où elle n'a aucune chance de se cacher d'ailleurs. Le vocabulaire seul a changé, les anathèmes sont désormais : fascisme, racisme, antisémitisme, conspirationnisme, négationnisme.

De telles accusations ne peuvent salir que ceux qui les portent inconsidérément. Nous, nous avons appris à écouter et échanger avec tout le monde, y compris et surtout celles et ceux qui ne pensent pas comme nous, puisque c'est le meilleur moyen de les convaincre et/ou de tester la pertinence de nos arguments et remédier le cas échéant à leurs lacunes. Gandhi, le Mahatma, a cherché le dialogue avec Hitler. Que je sache, il n'a pas été contaminé le moins du monde par l'idéologie du Führer. L'immense travail sur soi, la satyagraha, qu'il a fait des décennies durant, avec confiance, sérénité et détermination, est un exemple. Je regarde régulièrement des vidéos d'Alain Soral, et curieusement, je n'ai jamais eu envie de prendre une batte de base-ball pour aller taper du juif dans la rue. Je regarde aussi, d'ailleurs, des vidéos de BHL, et je n'ai jamais eu envie d'acquérir des drones pour pouvoir massacrer des arabes (en les aimant). Allons jusqu'au Grand Satan : il est possible de regarder des vidéos de Robert Faurisson, et de ne pas se mettre à fabriquer des chambres à gaz qui n'auraient pas existé pour y enfourner les survivants. La sérénité et le discernement, nous avons appris à nous en servir.

Les dissidents sont révisionnistes par nature. On leur dit : "c'est comme ça!" et ils répondent : "heu? t'es sûr? on va vérifier!". C'est ce que fait tout scientifique, tout historien, tout esprit critique, tous les jours. C'est ce que tous les Pouvoirs ont persécuté (puisque ça s'attaque à leurs fondements également). Ce n'est pas parce qu'ils sont persécutés, les dissidents, qu'ils ont raison. Cela aussi, nous l'avons appris, et nous appliquons donc notre révisionnisme à nous-mêmes, nous vérifions les idées les uns des autres et vice versa. Mais, c'est parce qu'ils sont persécuteurs inquisitoriaux, les cléricaux de tous les Temps, qu'ils ont tort. C'est cela que nous devons faire comprendre pour nous défaire définitivement de l'emprise médiatique. Ce n'est pas gagné!

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