vendredi 27 septembre 2013

Texte, prétexte, contexte - l'éducation du populo

Il y a les bons auteurs et il y a les mauvais auteurs. Les bons auteurs, ce sont des ordures mais ils écrivent le Bien. Les mauvais auteurs, ils écrivent bien, mais ce sont des ordures.

Une nouvelle fois le cas Céline sur la table, et comment ne pas se lasser? Évoquer Céline, et regarder le tournant, on vous y attend. C'est fatal. Il y a des degrés, mais on vous y attend. C'est inévitable. Faut pas en faire une référence littéraire, c'est une ordure. 

Tôt ou tard, mais plutôt tôt, on vous fera le coup de l'antisémitisme. C'est insupportable. Les plus anars estimeront qu'on peut lire Céline à condition de placer 300 pages de préface sur les heures les plus sombres de notre histoire. Les cheveux poussent à l'intérieur de la tête. 

Dans ses pamphlets, le génie de Céline bing ! bang ! éclate de toutes parts, direct à l'intérieur de la tête de l'insensé(e) tenant l’œuvre entre les mains. Jamais personne n'a écrit comme ça, ni n'écrira comme ça. Mais! c'est antisémite blabla. Et alors ? Ce que Céline pensait, lui avait à l'assumer, à y faire face, il est mort, on ne peut plus le lui demander, l'affaire est classée. On s'en fout, qu'il ait été le plus grand antisémite de tous les temps. On est quand même libre de ne pas le devenir, rien qu'en le lisant. La grande peur des bienpensants! (je joue avec le feu, là). Que le populo se laisse influencer par de mauvaises lectures. Parce qu'il a été antisémite, il faudrait le ranger au placard. 

C'est la même avec tout ce qui dérange l'Ordre Moral. Prenons Rousseau. On est bien obligé de l'apprendre à l'école, mais passé à la moulinette démocrateuse. Que reste-t-il du texte de Rousseau? Rien. Et le médiacrate n'oubliera pas de rappeler qu'il a été un homme détraqué, qu'il a abandonné ses enfants, peut-être même les a-t-il mangés, que son fils s'appelle Robespierre et son petit-fils Staline, et caetera! Au prétexte que Rousseau écrivait contre l'Ordre Moral, son texte est passé par pertes et profits. Rousseau, il écrit bien, mais c'est une ordure : tu as compris populo?

Au contraire, prenons Voltaire. En voilà un qui a été utile à l'Ordre Moral moderne comme le vent au moulin. Vive le despotisme éclairé, le >>centre-gauche<< et tutti quanti. Voltaire, c'est magnifique : la philosophie, le Progrès, la tolérance (la tolérance!), les Lumières (les Lumières!). Ah! En revanche, il était détestable en tous points, menteur, négrier, enfin je ne fais pas la liste. Voltaire, c'est une ordure, mais il écrit le Bien : tu as compris populo? Le reste? à remettre dans le contexte. Passez, muscade!

Céline n'avait-il pas dit :
Je suis ! tu es ! nous sommes des ravageurs, des fourbes, des salopes ! » Jamais on dira ces choses-là. Jamais ! Jamais ! Pourtant la vraie Révolution ça serait bien celle des Aveux, la grande purification !

Mais la Bienpensance a des lunettes à filtres. Un rouge qui leur permet de regarder les dissidents : ils ne savent voir que leurs travers ; un bleu qui leur permet de regarder les bienpensants : ils ne savent voir que leur grandeur. De grands tartufes...

Vivement le permis de lecture à points.

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