vendredi 29 juin 2012

Plutôt Landru que Barroso

Les femmes, non contentes d'être femmes - mais qui le serait ? disait Desproges, ne font pas de sciences. Les esprits tatillons diront qu'elles en font moins que les hommes, et ils auront raison. C'est un problème, pour nous qui n'en voyons pas de raison objective. Mais il en est qui ne parviennent plus à dormir la nuit depuis qu'ils ont découvert cette triste réalité : nos amis de la Commission Européenne. La Commission Européenne ! Autant dire la maison-mère, ou presque. La "Commission" ! ça oblige et ça ordonne, ça interdit pour tout dire, c'est l'autorité compétente. Garde à vous. Mais là où ils font la différence, c'est bien entendu avec "Européenne"... Cette fois, les kangourous s'arrêtent de bondir, les aigles se posent, les Africains baissent la tête, le monde entier écoute le Phare du Progrès et l'Esprit des Peuples - "Européenne" ! N'en jetez plus. La maison-mère.

Vous le savez, j'aime l'étymologie. Et d'une. Et les hérésies. Et de deux. C'est pourquoi je me permettrai de rappeler à ces dépositaires de la Démocratie universelle et éternelle que "commission" trouve parmi ses origines l'idée de "commettre une faute, un pêché". Ils tiennent leur rang !

Le croiriez-vous ? Ils ont donc découvert, ces chers commissaires, que les femmes faisaient moins de sciences que les hommes. Or, personne au monde n'est plus sensible aux discriminations en tous genres (...) qu'un commissaire européen. Oui, on dit "un commissaire", parce que la Commission est à 66% masculine, le côté photogénique étant important, ils ont réussi à trouver quelques femmes qui passaient par là. C'est dire s'ils sont le fer de lance de la lutte contre les discriminations selon le genre. Rien ne leur est plus insupportable. 

Le croiriez-vous ? nos amis sont des experts, que dis-je ? ce sont les Experts, les technocrates en chef, la Compétence descendue sur Terre. Si bien que, pour ces Lumières de l'Humanité, un problème identifié est un problème réglé. Voici comment :



"Tous les clichés sur les femmes, réduites à leur rôle de séductrices, sont là :
  • le rose ;
  • les minijupes ;
  • les talons aiguilles ;
  • la démarche chaloupée (qui trouble jusqu’à un scientifique mâle pourtant très sérieux, le seul à bosser) ;
  • les regards coquins par dessus les lunettes de soleil ;
  • l’omniprésent bâton de rouge à lèvres (qui forme même le I de science, à la fin)."

Ces valeureux successeurs de la Congrégation pour la Propagation de la Foi ont en effet réussi le tour de force insensé de promouvoir tous les clichés sexistes dans les 53 secondes d'un clip destiné à les dénoncer. Livraison gratuite ! Et bonus à la pelle !...

L'approche des Jeux Olympiques n'aura pas manqué de les galvaniser pour aller toujours plus haut, plus fort, plus vite. Je dois en effet reconnaitre qu'ils ont progressé (dans l'ignominie). Parce que, le croiriez-vous ? (personnellement, j'ai du mal,) ils n'en sont pas à leur coup d'essai. 

Ces charitables Bienfaiteurs avaient en effet commis (c'est leur rôle, répétons-le) un clip de propagande signalé par François Asselineau. L'objectif ? Promouvoir l'élargissement et la fraternité européenne. 


Les étrangers sont très méchants et très vilains, et ils veulent même pas attendre la récréation pour nous casser la gueule. Heureusement ! nous, nous sommes la Déééééééééémocratie, la Paiiiiiiix, les Droiiiiiiiits de l'homme (et éventuellement de la femme), et nous sommes tous pareils c'est pour ça (et uniquement pour ça) qu'on s'aime bien, et nous sommes très gentils, tellement gentils que les méchants sont matés sans coup férir. Bref, une invraisemblable xénophobie dans un clip pensé pour la combattre. Et au passage, bien sûr, un cliché sexiste qui va bien.

Revenons à nos gazelles. Critiquée, la Commission Européenne s'est justifiée. La justification vaut son pesant d'or. Regardez-moi ça : 

"Par ailleurs, la Commission a rédigé un texte en anglais pour répondre aux critiques. Elle explique que « le rouge à lèvres est très apprécié par l’audience-cible »" (toujours grâce à Pascal Riché)
Génial ! Pompon ! Grand Prix Cochonou du sophisme ! Palme d'Or de la tautologie ! Oscars ! Toutefois, je dois leur donner raison. En fait, j'ai toujours tendance à penser que les propagandistes ont raison. Ils font ce qu'ils font parce que ça leur rapporte, et ils veulent absolument que ça leur rapporte. Alors, beaucoup de femmes (pardon, de cibles) sont certainement atteintes par un tel clip. C'est bien là le drame. Certains appellent ça le syndrome du larbin. Il n'y a de toute façon rien de mieux pour exploiter les gens que de leur faire croire que leur aliénation égale leur bonheur. Ah ! c'est formidable.

Évidemment, nous qui travaillons ces sujets toute la journée, nous voilà quasiment choqués et estomaqués devant une telle attaque. Mais sinon, ça glisse, ça coule, ça entraîne, musique couleurs image aidant (et clichés aussi, d'ailleurs). Le grand Robespierre ne disait-il pas : "La plus grande partie de nos concitoyens - la plus grande partie - est réduite par l'indigence à ce suprême degré d'abaissement, où l'Homme, uniquement occupé de survivre, est incapable de réfléchir aux causes de sa misère et aux droits que la nature lui a donné." ? Si, il le disait. On a autre chose à faire que réfléchir à tous les clips qu'on nous impose. 

Est-ce si curieux ? je regarde cette vidéo et immédiatement me vient à l'esprit : "Plutôt Landru que Barroso".

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