vendredi 2 mai 2008

La Princesse de Clèves dans La société de consommation

Qui a lu La Princesse de Clèves ? Et La société de consommation ? Pas moi en tout cas, mais je le regrette et tenterai d'y remédier un jour ou l'autre. Mais ces livres ont probablement assez peu de lecteurs de nos jours pour qu'ils soient traînés dans la boue sans que ça n'émeuve les foules en délire ! La Princesse de Clèves, d'abord, subit régulièrement les attaques - avec un ton et un sourire en coin qui manifestent la certitude de triompher - répétées de celui qui est devenu notre Président de la République. En effet, en effet mesdames et messieurs les jurés, lire de pareilles vieilleries (écrites, et ça n'est pas sans rajouter au grotesque de ce livre, par une femme) aujourd'hui n'a aucun sens, c'est qu'on a autre chose à faire (lire les infos dans le journal de référence 20 minutes ; regarder la Star Ac ; se coucher tôt pour se lever tôt pour travailler plus pour gagner... euh... plus). En fait, c'est devenu le running gag de Sarkozy : qu'il veuille faire rire son public, il lui suffit de critiquer La Princesse de Clèves. Alors c'est vrai qu'il y a plus urgent, qu'il y a plus dramatique et qu'il est un peu dérisoire de défendre un vieux livre. Mais Philippe Val a raison de, régulièrement, voler au secours de ce livre, de la littérature, de la culture et du langage en général. Car langage et culture sont les outils avec lesquels il nous est possible de penser et d'imaginer pour améliorer ce que nous pensons devoir l'être. Le mépris qui s'étend pour la culture, la langue, le temps long : est-il cause ou conséquence d'une époque pendant laquelle on expulse 25 000 immigrés (chiffre à atteindre coûte que coûte), on fait passer des lois judiciaires d'inspiration clairement anti-humaniste, etc. ? Plus on maîtrise la langue et la culture, et plus on peut s'écarter de la voie toute tracée, de la pente droitière, celle sur laquelle quiconque est censé glisser, à moins qu'il ne fasse les efforts pour la remonter. Aucun combat, aussi urgent soit-il, ne devrait nous faire abandonner celui de la culture.
Et d'ailleurs, n'est-il pas lui-même devenu urgent ? Voyez comme le cynisme a définitivement tout ravagé sur son passage en récupérant même ce pauvre Baudrillard (notre ami Beigbeder lit La société de consommation). Je vais être court sur cette question, parce que la pub n'est pas un ennemi nouveau bien entendu, et puis cet article publié sur Rue 89 traite très bien des problèmes que soulève cette horrible publicité. Sauf un, peut-être : la version Femme de cette publicité ne montre pas une femme lisant tel ou tel livre d'intello. En effet, il est évident qu'une femme ne pourrait pas être assez intelligente pour cela. Donc, la pub "Femme" ne montre qu'une femme très légèrement vêtue (sois belle et tais-toi). C'est encore une chance que ces ahuris n'aient pas accolé la tête de Simone de Beauvoir sur cette pub, je me demande d'ailleurs bien pourquoi ils n'ont pas osé, ce sont des petits joueurs. Le plus insupportable reste encore l'indifférence générale face à ces crimes contre l'intelligence.

Aucun commentaire:

Enregistrer un commentaire